Faire part > Prise de parole   




Prise de parole




A ce moment de l’histoire où l’idée de tout changement radical, de la totalité, a si bien été refoulée, la communication entre les humains fait défaut, de ce point de vue et sur cette base. Pourtant, les manifestations de l’insatisfaction ne manquent pas. C’est une première raison de notre prise de parole. De façon capitale, elle s’affiche comme appel à l’instauration centrale du débat sur la totalité. Ce débat, il reste à en définir les conditions et contenus, par le plus grand nombre de ses acteurs potentiels. A ce sujet, nous proposerons ici nos vues.

Le choix de notre pratique actuelle, isolée, est à la fois conséquence de cette absence de communication, et il est tout entier déterminé par la volonté de la dépasser. Il procède de la façon dont le conflit se mène pour l’instant, discontinue, en explosions de révoltes séparées, éloignées les unes des autres, parfois si furtives au regard de la totalité. Il répond à cette nécessité de s’opposer aux médiations qui dominent à l’échelle du monde, que ce soient comme armes de leur répression directe, ou représentations fallacieuses qui s’affichent en leur nom.

L’association d’individus que nous formons prend la parole pour une unité qui manque, dans le but de participer à sa fondation. Voilà l’enjeu vital dont nous nous affirmons partie prenante.   

Cet enjeu, ce sont des conditions objectives qui empêchent de le placer au centre ; qui paraissent extérieures et supérieures au pouvoir de chacun. Pourtant, si elles nous dépassent tous en assujettissant nos existences séparées, elles ne dépendent que de l’ensemble que nous sommes en tant qu’humanité.


Pour fonder notre discours et nos prises de position, nous avons fait nôtre ce principe méthodique, qu’il est nécessaire de sonder le monde, de le saisir, du point de vue du négatif, de la révolte en actes collectifs : là où l’on s’engage au plus loin dans la perturbation de sa marche réglée. Cela pour parer ce risque, que ce que nous disons, et pouvons projeter, ne résulte que de consciences sûres d’elles-mêmes, abusées dans la même étroitesse léniniste encore si dominante aujourd’hui. Mais cette mise en exergue des actes de révolte ne doit pas se changer en commode alibi, pour reproduire au final le même défaut de pensée. Il n’est d’aboutissement dans aucune théorie. La vérité est pratique.
 
En conséquence de cette exigence nous avons élaboré un moyen d’observation. Opérée en continu depuis janvier 2003, nous commençons aujourd’hui d’en livrer les résultats.


Dans cette époque où la prépondérance répressive de l’information « indépendante » est consacrée, où son hégémonie sur les moyens nouveaux et la définition des contenus de la communication ne va qu’en se renforçant, sa critique est devenue l’un des préalables à toute critique.

Face à la révolte qui rompt, quand l’imprévu surgit et l’inconnu se découvre, ce qui le médiatise de façon indépendante en nie la qualité, en formatant ce qui se libère au nom de visions limitées, d’intérêts particuliers, de réflexes bassement moraux, pour le faire rentrer dans la petite chronique du même monde sans fin. 

C’est la deuxième raison d’être de notre prise de parole, inséparable et à égalité de la première. Contre le règne des représentations et des croyances qui contraignent le mouvement de la totalité et tout rapport social, nous voulons rendre leur primauté aux actes de révolte, parce que dans ces élans collectifs se pose, d’une façon plus directe et centrale que n’importe où ailleurs, la question du sens.

Nous-mêmes médiatisons ces actes, nous-mêmes interprétons. L’essentielle différence, d’avec les modes de médiation admis dans cette fonction perpétuelle et séparée, tient à ce que notre discours ne vaut que comme moment et comme moyen, tendu vers le dépassement unifié de ce qui limite, et nous et ces actes. Si par nos consciences, comprises comme nos capacités individuelles à la pensée, nous portons haut convictions et intentions, c’est pour les livrer à l’épreuve du monde.

Car, de même que les séparations entre révoltés, l’enjeu est de mettre à bas cette infirmité, revendiquée, de nos consciences, si ridicule lorsqu’on l’ignore dans le mirage de son intégrité toute-puissante. La perspective est identique : elle projette la réalisation d’un rapport social où l’individuel et le particulier ne pourraient plus prétendre commander au collectif et au général, où leur dualité et leur opposition seront surmontées.




 avril 2007





    Prise de parole


Invitations au Débat sur la Totalité