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Au moins 270 morts au Kenya, dont 50 tués dans l'incendie d'une église

Par Elizabeth Kennedy AP - Mardi 1 janvier, 18h38

NAIROBI - Le Kenya s'est embrasé. Quatre hauts responsables de la commission électorale ont demandé mardi une enquête indépendante sur les résultats contestés de l'élection présidentielle qui ont provoqué la mort d'au moins 270 personnes lors de violentes émeutes dans tout le pays, dont cinquante dans l'incendie d'une église.

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Après ce drame, le président Mwai Kibaki a demandé aux partis politiques de se réunir immédiatement, lançant un appel au calme. Lequel a été immédiatement rejeté par son rival Raila Odinga, candidat de l'opposition, qui conteste sa réélection. "S'il annonce qu'il n'a pas été élu, je lui parlerai", a-t-il déclaré à l'Associated Press, accusant le gouvernement d'être "directement coupable de génocide".

Des immenses bidonvilles de Nairobi aux stations balnéaires de l'océan Indien en passant par l'ouest, bastion de l'opposition, et la vallée du Rift, la violence s'est emparée du Kenya après les résultats contestés de la présidentielle de jeudi dernier. Les animosités ethniques, toujours sous-jacentes, se sont réveillées: les Kikuyus, ethnie du président Kibaki et principal groupe du pays, dominent la vie politique et économique depuis l'indépendance, souvent aux dépends du reste de la population. M. Odinga est un Luo, autre ethnie importante, qui se présente comme le champion des pauvres. Et dans les bidonvilles, souvent organisés par ethnies, les groupes rivaux s'en prennent à ceux d'en face à coups de machettes et de bâtons.

Selon un responsable de la Croix-Rouge, au moins 50 personnes, dont beaucoup d'enfants, sont mortes mardi dans l'incendie d'une église où une centaine de personnes s'étaient réfugiées dans l'ouest du Kenya.

Une "immense foule (...) a attaqué l'église" dans laquelle étaient réfugiées plusieurs centaines de personnes, a raconté un témoin à Eldoret (à 300km de Nairobi), refusant de donner son nom par crainte de représailles. Deux officiers de police ont confirmé sous couvert d'anonymat que plusieurs personnes avaient été brûlées vives.

L'opposition conteste la réélection du président Kibaki, affirmant que le scrutin a été entaché de fraudes. Mwai Kibaki a été en toute urgence investi pour un nouveau mandat de cinq ans immédiatement après la proclamation des résultats.

Autre incident mardi, des partisans d'Odinga ont incendié un minibus dans le bidonville de Mathare, à Nairobi. Aux cris de "Pas de Raila, pas de paix", ils s'en sont pris aux voyageurs kikuyus.

"Le bus transportait 14 personnes mais ils ne s'en sont pris qu'aux Kikuyus", a raconté un témoin, Boniface Mwangi. Cinq ont été attaqués à coups de machette alors que les autres ont été volés.

Après quatre jours de violences et de pillages, les Kényans tentaient de trouver de la nourriture, alors que la majorité des magasins restaient fermés et que la police quadrillait les grandes villes.

A Nairobi, où le tiers de la population s'entasse dans les bidonvilles, des parents restés cloîtrés pendant des jours cherchaient désespérément de quoi nourrir leurs enfants, se frayant un chemin au milieu des restes de pneus et barricades brûlés.

Quatre des 22 responsables électoraux ont demandé une enquête indépendante sur le travail de la Commission électorale (ECK) pour savoir si elle a faussé les résultats. Jack Tumwa a déclaré à l'Associated Press que lui-même et trois de ses collègues ont le sentiment qu'"il y a des questions lourdes qui sont soulevées (...) sur la conduite de l'ECK pendant le décompte des résultats". Mais "la commission ne peut pas enquêter sur elle-même".

Lundi, Mwai Kibaki avait promis d'agir contre les opposants, alors que Raila Odinga appelait à une "marche d'un million d'hommes" à Nairobi jeudi prochain, déterminé à passer outre l'interdiction par le gouvernement.

La communauté internationale s'inquiète de la situation au Kenya, un des pays les plus stables et prospères d'Afrique orientale. Le Premier ministre britannique Gordon Brown a exhorté Kibaki et Odinga à se parler. La France, par la voix du Quai d'Orsay, s'est dite "consternée", appelant "tous les leaders politiques à contribuer au retour au calme et à éviter toute action susceptible d'accroître les tensions". Paris "partage pleinement les doutes" exprimés par les observateurs de l'Union européenne, notamment concernant le dépouillement des votes. AP

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