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Kenya: 33 morts depuis mercredi, l'opposition change de stratégie

Par Par François AUSSEILL AFP - il y a 2 heures 38 minutes

NAIROBI (AFP) - Au moins 33 personnes ont été tuées depuis mercredi et les trois jours de manifestations convoquées par l'opposition kényane, qui a changé de stratégie vendredi en appelant au bocyottage des entreprises de proches du chef de l'Etat réélu Mwai Kibaki.

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Après les 25 morts déplorés de mercredi à vendredi, huit autres personnes ont été tuées dans la nuit de vendredi à samedi.

"Trois personnes ont été tuées dans la nuit à Baba Dogo et Kibera (deux bidonvilles de Nairobi), mais nous continuerons à faire respecter la loi et l'ordre, coûte que coûte", a déclaré à l'AFP un haut responsable de la police sous couvert de l'anonymat.

La police les a tuées, a-t-il précisé.

Cinq autres personnes ont été tuées à Kisumu, dans l'ouest du pays, durant cette dernière nuit, et "nous enquêtons pour savoir qui les a tuées", a indiqué à l'AFP un commandant de police de Kisumu, l'une des villes les plus touchées par les violences post-électorales qui ont fait au moins 700 morts depuis les élections du 27 décembre.

Vendredi, au dernier jour des manifestations visant à protester contre les résultats de l'élection présidentielle du 27 décembre, entachés de fraudes selon de nombreux observateurs, cinq personnes -quatre à Nairobi et un à Mombasa (est)- ont été tuées par balle par la police, qui a interdit tout rassemblement.

Déplorant la répression des forces de l'ordre, neuf ambassades occidentales au Kenya, dont le Royaume-Uni, ont appelé les autorités kényanes à cesser de tuer des "manifestants désarmés", enjoignant la police d'abandonner "tout usage disproportionné de la force".

Amnesty International a aussi estimé que "en tirant à balles réelles sur la foule", la police "a de beaucoup surpassé ce qui est acceptable en terme d'usage de la force".

Cinq cadavres portant des marques de flèches et des coups de machettes ont aussi été découverts vendredi à Narok (sud-ouest) à la suite d'affrontements entre groupes rivaux, vraisemblement dans la nuit de jeudi à vendredi.

Depuis mercredi, quinze autres personnes ont été tuées dans le pays, la plupart par la police, notamment dans les bidonvilles de Nairobi et dans la ville de Kisumu (ouest), des bastions électoraux de Raila Odinga, arrivé deuxième de la présidentielle, selon des sources policières.

Vendredi, une manifestation de plusieurs milliers de personnes à Mombasa a été dispersée par la force, tandis que la police a fait usage de gaz lacrymogène contre des centaines de manifestants à Kisumu.

Le Kenya traverse une crise politique majeure depuis la réélection contestée, le 27 décembre, de M. Kibaki: au moins 700 personnes ont été tuées dans des violences depuis trois semaines. Quelque 200.000 personnes sont actuellement déplacées.

Devant la répression policière, le Mouvement démocratique orange (ODM) de M. Odinga a annoncé la fin des manifestations et une nouvelle stratégie visant à affaiblir le camp présidentiel.

"Nous entrons maintenant dans une nouvelle phase de la lutte qui inclura un boycottage économique par les consommateurs de grandes sociétés appartenant à des faucons proches de M. Kibaki", a expliqué le porte-parole de l'ODM, Salim Lone.

Il a notamment cité la compagnie de produits laitiers Brookside Dairies, les compagnies de transports en commun City Hopper et Kenya Bus Service, ainsi que la banque Equity Bank.

"De grâce, laissons le secteur privé en dehors de la politique", a réagi le porte-parole du gouvernement Alfred Mutua devant cette proposition de boycottage d'entreprises.

Dans un rapport publié vendredi à Nairobi, une coalition d'organisations africaines a accusé des responsables de la Commission électorale kényane d'avoir manipulé les résultats de certaines circonscriptions pour garantir la réélection de M. Kibaki.

Sur le plan diplomatique, l'ancien secrétaire général des Nations unies Kofi Annan est attendu mardi à Nairobi pour tenter une médiation, une visite qui avait été reportée pour raisons de santé.

De son côté, le président kényan a nommé "un comité politique de haut niveau pour mener le dialogue national politique et la réconciliation nationale", composé notamment du vice-président Kalonzo Musyoka et de six ministres.

Prié de dire si son parti rencontrerait ce comité, le secrétaire général de l'ODM, Anyang Nyongo, a répondu: "Nous allons attendre qu'il communique avec nous et nous prendrons notre décision".

En attendant une éventuelle rencontre, M. Odinga s'est entretenu de la crise notamment avec l'ancien président tanzanien Benjamin Mkapa, membre de l'équipe de médiation conduite par M. Annan.

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