NAIROBI (AFP) - Les autorités kényanes ont rejeté vendredi l'éventualité d'une nouvelle élection présidentielle réclamée par l'opposition, dont les appels à manifester à Nairobi ont été déjoués, comme la veille, par un fort déploiement des forces de l'ordre.
L'archevêque sud-africain Desmond Tutu, prix Nobel de la paix, a toutefois indiqué que le chef de l'Etat était "ouvert" à la négociation d'un gouvernement de coalition avec l'opposition, après avoir rencontré le président Mwai Kibaki et son opposant Raila Odinga, qui conteste sa réélection lors du scrutin du 27 décembre.
Dans la capitale kényane quadrillée par les forces paramilitaires, la tension était retombée par rapport à jeudi. Des commerces et des banques avaient rouvert, la circulation automobile reprenait et la vie quotidienne revenait lentement à la normale.
A la mi-journée, le Mouvement démocratique orange (ODM) de M. Odinga a appelé à la tenue d'un nouveau scrutin.
"La route à suivre impliquera un accord de transition durant lequel des préparatifs sérieux pourront être faits pour une nouvelle élection du président selon des règles du jeu transparentes et démocratiques", a déclaré à la presse Anyang Nyongo, secrétaire général de l'ODM.
"Cela, au regard de nos conditions, peut être fait en moins de trois mois", a-t-il ajouté.
Quelques heures plus tard, les autorités opposaient un refus ferme.
"Le gouvernement ne cèdera jamais au chantage. Les gens devraient cesser d'utiliser la violence comme forme de chantage" pour obtenir de nouvelles élections, a déclaré à la presse le porte-parole du gouvernement, Alfred Mutua.
La police paramilitaire quadrillait toujours vendredi le grand parc public du centre, Uhuru Park, où l'ODM, comme la veille, avait appelé ses partisans à se rassembler.
Aux abords de Kibera, le grand bidonville de Nairobi et fief de M. Odinga, la police était de nouveau déployée en masse. Aucun incident n'était signalé vendredi à la mi-journée et aucune barricade de manifestants n'était visible, contrairement à jeudi.
"Nous avertissons une nouvelle fois que nous n'autoriserons personne à tenir un rassemblement en ville. De tels meetings ont été interdits", a indiqué à l'AFP le porte-parole de la police, Eric Kiraithe.
Toute la journée de jeudi, la police avait eu recours aux canons à eau, aux tirs en l'air à balles réelles et aux gaz lacrymogènes pour contenir les manifestants aux abords de Kibera.
La police a par ailleurs annoncé qu'elle enquêtait sur l'implication présumée d'un homme politique de l'opposition dans l'incendie criminel d'une église qui a fait au moins 35 morts mardi dans l'ouest du pays.
"Nous enquêtons sur un homme politique de l'opposition suspecté d'avoir fourni des armes blanches et de l'alcool et encouragé la foule qui a attaqué l'église, dans le but de l'inculper", a déclaré à l'AFP M. Kiraithe.
Sur le plan diplomatique, après l'échec d'une médiation Union africaine-Commonwealth, la secrétaire d'Etat adjointe américaine chargée des Affaires africaines, Jendayi Frazer, était attendue vendredi à Nairobi.
Mme Frazer a pour mission de promouvoir un dialogue entre M. Odinga et le président Kibaki, après les violences politico-ethniques qui ont fait 356 morts depuis le scrutin du 27 décembre, selon un bilan établi par l'AFP de sources policières et hospitalières et auprès de plusieurs morgues.
Outre les morts, les violences politico-ethniques ont fait environ 100.000 déplacés, selon la Croix-Rouge kényane.
En revanche, les autorités kényanes ont affirmé jeudi que la sécurité des touristes étrangers était assurée. Le tourisme est une des principales ressources du pays, dont l'économie est paralysée depuis le 27 décembre.
Cette paralysie entraîne des pénuries de carburant dans plusieurs pays d'Afrique de l'Est et des Grands Lacs, qui utilisent le port kényan de Mombasa, sur l'océan Indien, pour leurs importations de produits pétroliers, selon des correspondants de l'AFP.
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