NAIROBI (AFP) - Les Kényans se préparaient dimanche à une très probable troisième semaine consécutive de troubles, l'opposition qui dénonce les résultats de l'élection présidentielle du 27 décembre ayant appelé à trois jours de manifestations, que la police a une nouvelle fois interdites.
L'organisation de défense des droits de l'Homme, Human Rights Watch (HRW), a demandé dimanche aux autorités kényanes de "désamorcer la tension en levant immédiatement l'interdiction sur les rassemblements publics et en autorisant les manifestations prévues" les 16, 17 et 18 janvier. Un appel qui restait lettre morte dimanche en début d'après-midi.
Vendredi, l'opposition a annoncé trois jours de manifestations dans trente villes du pays, mais les autorités les ont immédiatement déclaré illégales, laissant planer des craintes de nouvelles violences.
Jusqu'à présent, la police a réprimé par la force tous les rassemblements convoqués par l'opposition, "tuant et blessant des dizaines de personnes" dans le pays, selon HRW.
Depuis l'annonce officielle, le 30 décembre, de la victoire du chef de l'Etat sortant Mwai Kibaki à l'élection présidentielle, le Kenya est plongé dans une crise majeure: "plus de 700 personnes" ont été tuées, selon un dernier bilan fourni par un haut responsable de la police qui a requis l'anonymat.
Ces affrontements, qui opposent partisans de l'opposition et du pouvoir mais aussi manifestants et police, ont culminé les 30 et 31 décembre et la première semaine de janvier. Depuis, la situation est beaucoup plus calme, mais elle reste extrêmement tendue.
En prévision d'éventuels nouveaux troubles et d'une nouvelle fermeture des commerces cette semaine, la population faisait des provisions ce week-end, notamment dans la capitale Nairobi, où les supermarchés connaissaient une affluence hors du commun.
"Je fais des courses, au cas où on ne pourrait pas acheter la semaine prochaine. Il y aura des troubles, sans aucun doute", a expliqué un client, Emos Soul.
A un distributeur de billets, un ingénieur, Cosmas Mbugua, retirait plus de liquide que prévu: "La situation est très incertaine: des manifestations sont prévues, le parlement va rouvrir" mardi.
Les cours doivent aussi reprendre cette semaine, dès lundi, alors que la rentrée, après les vacances de Noël, eût été reporté d'une semaine en raison des violences.
Dans les jours prochains aussi, l'ancien secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, nommé médiateur dans la crise kényane, est attendu au Kenya.
Jusqu'à présent, les interventions de plusieurs présidents et ex-présidents africains, de la secrétaire d'Etat adjointe américaine aux Affaires africaines, Jendayi Frazer, ainsi que du prix Nobel de la paix et archevêque sud-africain Desmond Tutu n'ont pas permis de débloquer la situation.
Semblant inflexible, le président kényan réélu a nommé cette semaine un gouvernement partiel, immédiatement rejeté par Raila Odinga, qui est arrivé deuxième de la présidentielle. Les deux hommes ne se sont toujours pas rencontrés, malgré les pressions intenses de la communauté internationale, qui tente de ramener le calme dans un pays qui était considéré, jusqu'aux troubles récents, comme un îlot de stabilité dans une région ravagée par les conflits.
La crise kényane actuelle a provoqué le déplacement de plus de 255.000 personnes, dont les maisons ont été pour la plupart brûlées ou pillées. Par signe de solidarité, des supermarchés de Nairobi organisaient ce week-end des collectes de vêtements, de nourriture et de couvertures, au profit de la Croix-Rouge.
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