Quatorze personnes ont été tuées au Kenya mercredi et jeudi pendant ou en marge des manifestations de l'opposition qui dénonce la réélection du président Mwai Kibaki, selon un nouveau bilan de la police communiqué vendredi à l'AFP. Les victimes ont été tuées dans des affrontements entre d'une part les partisans de l'opposition et ceux du pouvoir et d'autre part entre manifestants et forces de l'ordre. Le précédent bilan de la police pour ces deux jours d'émeutes qui ont opposé partisans de l'opposition et forces de l'ordre était de sept morts. Sur les quatorze personnes tuées mercredi et jeudi, sept ont trouvé la mort à Kisumu, ville de l'ouest du Kenya, et les sept autres dans la capitale, essentiellement dans des bidonvilles, fiefs de l'opposition L'opposition kényane, qui proteste contre la réélection du président Mwai Kibaki, a annoncé que vendredi serait le "dernier jour des manifestations" et que la "lutte" entrait dans une "nouvelle phase" avec le boycottage de sociétés appartenant à des proches de M. Kibaki. "Aujourd'hui (vendredi) est le dernier jour des manifestations", a déclaré Salim Lone, le porte-parole du principal parti d'opposition, le Mouvement démocratique orange (ODM). L'ODM avait appelé à de nouvelles manifestations dans tout le pays de mercredi à vendredi, mais elles ont été interdites par la police, qui a violemment réprimé les récalcitrants mais aussi des passants: au moins quatorze personnes ont été tuées dans ces violences mercredi et jeudi, selon la police. Le Kenya traverse une crise politique majeure depuis la réélection, le 27 décembre, de M. Kibaki: au moins sept cents personnes ont été tuées dans des violences politiques depuis trois semaines. La police a de nouveau durement réprimé jeudi les manifestations de l'opposition. Les trois jours de manifestations (mercredi, jeudi et vendredi), interdites par la police, ont été maintenues par le Mouvement démocratique orange (ODM) de Raila Odinga pour protester contre la réélection du président Mwai Kibaki le 27 décembre, accusé par son rival d'avoir fraudé. Tout au long de la journée, la police a tiré à balles réelles et à blanc et fait usage de gaz lacrymogène pour disperser des partisans de l'opposition, notamment dans les bidonvilles de Mathare et Kibera à Nairobi et à Kisumu et Eldoret, dans l'ouest. A Mathare, des centaines de partisans de Raila Odinga faisaient face aux forces de l'ordre. A Kibera, des groupes de jeunes gens ont érigé des barrages et d'autres ont tenté de piller un train de marchandises avant que la police n'intervienne. A Eldoret, la police paramilitaire a tiré des gaz lacrymogènes dans l'hôpital public de la ville et à balles réelles à l'extérieur de l'établissement. Au moins 14 employés ont été battus par les forces de l'ordre, alors qu'ils tentaient d'empêcher la police d'entrer plus avant dans l'hôpital, a affirmé à l'AFP le responsable des relations publiques de l'hôpital Moi, Tony Kirwa. "Les manifestations continuent et nous n'allons ni être intimidés ni stoppés jusqu'à ce que nous atteignions notre but", a martelé jeudi le secrétaire général de l'ODM, Anyang Nyongo. "La principale intention de l'opposition est de détruire le mode de vie des Kényans ordinaires. Elle ne prend pas en compte l'intérêt des Kényans", a rétorqué le porte-parole du gouvernement, Alfred Mutua. Au plan diplomatique, les Etats-Unis ont rendu les deux leaders kényans "également responsables" de ces nouvelles violences, déplorant "l'impasse politique" dans le pays. Le Commonwealth, dont le Kenya - ancienne colonie britannique - est membre, a jugé que les élections qui ont déclenché la crise "n'ont pas été aux normes internationales" dans la phase du comptage des voix. Le Parlement européen a lui demandé le gel de toute aide budgétaire au gouvernement kényan et l'organisation de nouvelles élections au cas où "un recomptage des voix justes s'avère impossible". Enfin, l'ex-président tanzanien Benjamin Mkapa et Graça Machel, épouse de l'ex-président sud-africain Nelson Mandela, sont arrivés à Nairobi où ils doivent participer à une médiation. Le Kenya - jusqu'alors considéré comme un îlot de stabilité dans une Afrique de l'Est rongée par les conflits - est plongé, depuis la réélection de M. Kibaki, dans une crise qui a fait au moins 700 morts et provoqué le déplacement d'environ 200.000 personnes. Les Nations unies ont à ce titre lancé un appel de fonds de 41,8 millions de dollars pour "apporter de l'aide humanitaire (...) aux quelque 500.000 personnes touchées par les violences".
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