Cameroun : Enoh Meyomesse , ‘’Même les Beti ont lâché Paul Biya’’

Enoh Meyomesse : camer.beLe premier candidat déclaré aux élections présidentielles de 2011 commente les émeutes qui embrasent le Cameroun. Il salue l’action syndicale qui a repris de la plus belle des manières dans son pays. Le natif d’Ebolowa appelle à l’émergence d’un véritable leader au sein de l’opposition. Il propose aussi la dissolution de la société pétrolière SONARA.  

Enoh Meyomesse, vous est-il possible de donner votre point de vue sur la situation socio-politique actuel du Cameroun à la rédaction de camer.be?

Naturellement. Tout d’abord, nous avons suivi, avec beaucoup de désolation, le discours de Paul Biya. Comme à l’accoutumée, il a fait étalage d’une part de sa très grande suffisance, d’autre part de son mépris profond des Camerounais. Je ne dirai pas plus.

Comment appréciez-vous ce qui arrive dans votre pays ?
Nous nous devons de relever, avec satisfaction, que les syndicats ont, enfin, repris vie au Cameroun. Ce sont ceux-ci qui ont mené, de bout en bout, les choses. Où étaient nos grands leaders politiques traditionnels ? Tous, si vous ne le savez pas, ont perçu de fortes sommes d’argent, soit pour retourner leurs vestes et soutenir le régime, soit alors pour ne rien dire, ou alors faire semblant d’être avec les grévistes, mais, sans plus. Je crois que vous êtes au courant des montants : 10 millions de francs cfa, pour cet ancien ministre qui a cassé les oreilles aux Camerounais, tout au long du week-end dernier. A nous, il a été proposé la moitié, pour que nous allions également tenir une conférence de presse au même titre qu’Issa Tchiroma. Ce que nous avons, tout naturellement, refusé de faire.
‘’Si Tonye Bakot n’avait pas été là’’

Que savez vous de la position des autres dirigeants notamment ceux de l’opposition ?
Même les leaders politiques les plus bouillants qui résident à Douala, et qui donnent à chaque fois l’impression d’être prêts à mettre le feu au Cameroun pour que Paul Biya parte du pouvoir, ont perçu de l’argent.

Vous voulez clairement dire qu’ils sont corrompus? Si oui par qui ?
L’un d’eux, actuellement député, une fois son enveloppe en poche, a pris l’avion et se la coule douce, en ce moment, en France. N’êtes-vous pas surpris qu’il ne dise rien ? Nous devons vous rappeler que c’est toujours ainsi que les choses se passent. Souvenez-vous des sommes d’argent qui avaient été distribuées, au mois de décembre 2006, par le Premier ministre, à toutes les personnes qu’il avait reçues en consultation, au sujet d’ELECAM.

Pouvez vous nous en dire plus ?
Seul Monseigneur Tonyé Bakot, archevêque de Yaoundé, s’était interrogé sur la raison de l’enveloppe d’un montant de trois millions de francs qui lui avait été remise. Réponse : « c’est pour votre carburant… ». Et lui de poursuivre : « de la cathédrale à ici, au Premier ministère, même pas un seul kilomètre, trois millions de carburant !!!! »
En revanche, tous les chefs de partis dont il n’est pas nécessaire de citer les noms, et qui ne manquent jamais une occasion pour dénoncer « le régime de Paul Biya corrompu jusqu’à la moelle » avaient cousu leurs bouches. Personne n’avait rien dénoncé cette fois-là. Si Tonye Bakot n’avait pas été là, les Camerounais n’auraient rien su du tout de ces marchandages sordides.

‘’Paul Biya a profité de l’euphorie des Camerounais’’

Revenons à l’actualité. Qu’est ce qui est à l’origine de l’explosion de la violence actuelle à votre avis?
Nous ne pouvons que nous insurger devant la cherté de la vie au Cameroun. Faudrait-il rappeler que le litre d’essence coûte, au Nigeria, qui produit du pétrole comme nous, 241 francs, au Gabon, autre producteur de pétrole, 341 francs, en Guinée Equatoriale, pays également producteur de pétrole, 310 francs, et que, au Bénin, pays non producteur de pétrole, 400 francs cfa ? Nous, au Cameroun, nous nous retrouvons à 600 francs le litre, et, bien mieux, Talba Malla,  le DG la Caisse de Stabilisation des Prix des Hydrocarbures nous fait savoir que l’Etat nous fait même une extrême faveur en ne fixant le prix de litre qu’à ce montant-là, car le véritable prix qu’il devrait faire payer aux Camerounais est de …700 francs cfa !!! N’est-ce pas scandaleux ? Chose encore plus choquante, Paul Biya a profité de l’euphorie des Camerounais à la suite de la victoire de notre équipe nationale en demi-finale de la C.A.N. pour augmenter, en catimini, de 16 francs, le prix du litre d’essence. Comment qualifier un tel comportement ? Et lorsque les choses se mettent à chauffer, il n’est plus là pour défendre sa décision…

Comment peut-on résoudre la crise du pétrole au Cameroun ?
De notre point de vue, si la SONARA ne peut nous procurer, pour notre consommation locale, du pétrole moins cher, nous sommes partisan de sa fermeture. Il serait alors préférable de procéder comme le Bénin qui, bien que ne produisant pas de pétrole, commercialise son essence à 400 francs cfa à la pompe. Le pétrole que nous produisons, serait alors destiné à l’exportation, uniquement, pour nous faire gagner de l’argent. Mais, il y a mieux, Ahmadou Ahidjo ayant cédé le sous-sol camerounais à la France le 30 décembre 1958, il faudrait, avant tout, abroger ces accords, véritables traités inégaux, qu’il avait signés dans l’unique but d’être agréé, par le gouvernement français, comme futur président du Cameroun, deux années plus tard. Ceci nous permettra, par exemple, de devenir, enfin, membre de l’OPEP.

Quelle est votre analyse sur la crise actuelle de manière globale?
Pour ce qui est de l’émeute, proprement dite, notre point de vue est le suivant : le peuple camerounais s’est, enfin, réveillé, après le cuisant échec des villes mortes, en 1991. En ce temps-là, nous étions de ceux qui condamnaient, fermement, cette aventure, pour la simple raison qu’il ne faut pas engager une révolution sans s’assurer de la conduire jusqu’à son terme. Autrement, la contre-révolution qui s’en suivra, sera terrible. C’est ce que nous avons connu après l’échec, pourtant prévisible, des villes mortes. Les initiateurs de cette méprise, ne disposaient d’aucun moyen de paralyser la ville de Yaoundé. En conséquence, ils n’avaient aucune chance de réussir. Après cet échec retentissant, les Camerounais ne croyaient plus aux vertus de l’insurrection, et le régime de Paul Biya s’est plutôt retrouvé renforcé.

Vous voulez dire que la démarche de la génération des manifestants actuels est à revoir et à corriger ?
Par bonheur, aujourd’hui, nous avons à faire à une nouvelle génération de Camerounais, qui n’ont pas connu cette époque-là. C’est pourquoi la lutte semble reprendre. Mais, il y a de nouveau un problème majeur. Nulle part, dans le monde, une insurrection spontanée n’a renversé un régime. Des auteurs de renom, à l’exemple de l’Allemande Rosa Luxembourg, dans les années 20, ont abondamment écrit sur ce sujet. Pour qu’une insurrection triomphe, il faut, absolument, un parti d’avant-garde qui conduise cette dernière. Or, malheureusement, dans le Cameroun d’aujourd’hui, nous sommes loin d’en disposer. En conséquence, il y a fort à parier que la révolte actuelle finira par s’estomper, même si elle dure plusieurs jours, voire plusieurs semaines.

Le chef de l’Etat prévient en effet que l’ordre régnera et que la paix sera rétablie
Quoi qu’il en soit, le président de la République est dans de sales draps. Il vient de découvrir que sa « large majorité » à l’assemblée nationale, ne lui garantit nullement une révision tranquille de la constitution afin qu’il puisse s’éterniser au pouvoir. La population, de toute évidence, est dans l’attente d’une étincelle pour s’embraser. L’augmentation surprise du prix du carburant en a été une. Nous voyons, actuellement, sa réaction. Jamais, depuis l’indépendance, survenue en 1960, c’est-à-dire il y a 48 ans, une grève n’a connu une telle adhésion générale. Jamais. C’est très mauvais signe pour le président de la République. Pis encore, il a reculé. Il a fini par consentir une légère baisse du prix fixé. En d’autres termes, le peuple lui a fait mettre un genou à terre. C’est terrible pour lui, « Monsieur la suffisance ». Actuellement, il est coincé. Il ne peut plus, de nouveau, même dans six mois ou un an, rajouter un centime de plus sur le prix du carburant, sans que le peuple ne redescende dans la rue. Ce n’est pas tout, il ne peut même plus augmenter aucun autre prix, sans que la population ne descende dans la rue. De même, s’il s’avise à continuer à modifier sa constitution, le peuple, de nouveau sera dans la rue. La situation est d’autant plus critique pour lui que, même les Beti qui avaient constitué, jusque là, l’armature politique de son régime, brisaient, dans la ville de Yaoundé, tous les mouvements sociaux, l’ont, cette fois-ci, lâché. Désormais, la capitale du Cameroun est en mesure d’être paralysée. Il ne peut donc plus crâner en ces termes : « quand Yaoundé respire, le Cameroun vit ».

© Camer.be : Réaction recueillies par Hermann Oswald G’nowa
Paru le 28-02-2008 01:22:01
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so-whyJ'apprecie le titre de cette interview. Et par ricochet, la tentative de manipuler les lecteurs.Je comprends donc par là que les betis ont toujours défendu bec et ongles Popol. Ce titre à mon avis est un glissement naifs et dangereux. Nous savons tous qui soutient Popol et ses sbires: ce sont tous ceux qui profitent du climat de corruption qu'il est sensé avoir instauré.
MankenpissLes betis souffrent de la présence de BIYA comme tous les autres camerounais. La tribalisation exacerbée par les journaux lors des villes mortes a amené les betis à former un bloc afin de se défendre. Aujourd'hui n'étant plus pointé du doigt comme bénéficiaires de la présence de BIYA au pouvoir, ils expriment aussi leur frustration. Seuls ceux qui profitent financièrement de l'ère POPOLI le soutiennent, quelque soit leur tribu.(ex: Mme FONING, CAVAYE Djibril qui bénéficie d'un crédit de 80 millions non remboursable pour rouler comfortablement, idem que ses vice-président qui reçoivent 40 millions chacun également non remboursable ... ). Cerise sur le gateau, ils percevront chacun la moitié de ce pécule dans 3 ans pour remettre leur limouse à neuf.
comonasDont ce faignéant de Biya n'a encore rien compris ? il parle des moyens légaux dont dispose le gouvernement !! je me demande de quel gouvernement il parle ? je ne reconnais pas ton gouvernement espèce de bandit et voyou, tu dois partir ou rien, ou ca passe ou ca casse. tu parle de sorciers, c'est toi le plus laid et gros pédé sorcier que le Cameroun n'est jamais connu. i est temps pour toi de te casser. essaye de mener cette modifications de la constitution et tu verras ce que c'est que le Peuple du Cameroun. pédé vaa!!! Et puisque tu as déclaré la guerre au peule Cameroun alors prepare toi à cette guerre, cette fois ci sache ou ca passe ou ca casse.
EvaEvaQu'il ya ait opposition ou pas, popol doit partir. Le Cameroun a besoin d'un président qui a un sens des responsabilités, quelqu'un qui sait prendre soin de tout un peuple, qui sait ce qu'endure les autres, qui pense au bien être des autres, qui sait mettre en valeur les richesses du pays ceci au profit de sa population. On est quand même au 21ème siecle. Je suis né 5 mos avant que popol ne soit président et aujourd"hui, il ya en a plein qui prefère l'époque du feu AHIDJO à celle de popol.
Mister''sTrop c'est trop, Popol toi aussi dis donc!!! tu devrais avoir honte!!! mais c'est quoi ce genre de personnes... 75 ans, après avoir reigné 25 ans puis tu veux encore en rajouté, mais voyons!!! auras-tu seulement encore un peu de force meme pour nous pomper tes fameux discours??? D'autre part, je pense que les bétis en fait n'ont jamais été pour Paul Biya, ils sont camerounais comme tout le monde... ils ont été de simples victimes et hérités d'une facheuse situation... En réalité c'est l'affaire d'une clic de personnes égoïstes et égocentriques qui n'ont d'yeux que pour eux et leur proche... toute chose a une fin... le glas a sonné...
SeydouJe suis tout à fait d'accord avec l'analyse selon laquelle les beti, dans les années 90 avaient dans une grande majorité formé un bloc compact derrière le Président de le république. En réalité, ils étaient pris en otage entre les opposants au régime qui assimilaient sans distinction, tout beti à un un partisan de la cleptocratie, et les barons du régime qui comme toutes les dictatures leur faisaient croire que si jamais Biya était écarté ils seraient tout simplement écrasés. C'est à cette époque que le professeur Roger Gabriel Nlep de regretté mémoire avait forgé le concept de triangle équilatéral Béti-bami-"nordistes"(les nordistes désignant à vrai dire l'aristocratie foulbé minoritaire dans la partie septentrionale du Cameroun)Ce faisant, il réalisait un constat empirique d'une grille de lecture socio-politique qui enfermaient l'ensemble de la nation dans un shéma tribal étroit, car toutes les autres ethnies étaient rangées de gré ou de force dans ces catégories. Or sans être manichéen, il me semble évident que le véritable combat est celui d'une oligarchie qui a confiqué les biens qui appartiennent à tous. Elle se caractérise par son arrogance et l'incompréhensible certitude d'être en tout au-dessus de tous. Jusqu'à présent les faits ont semblé leur donner raison, puisque l'impunité pour les crimes crapuleux a été érigée en mode de gestion de la chose publique. Cependant malgré les diplômes dont ils sont bardés, on se rend compte que la plupart ont essé toute forme de travail intellectuel, car la pertinence de leurs analyses est misérablement stupide. Ils n'ont pas compris qu'on ne peux plus accuser les politiciens comme le fait Biyiti bi Essam alors même qu'il n'est pas nécessaire de s'appeller Emile Durkheim ou Jean Marc Ela pour voir que les politiciens de l'opposition n'ont aucune prise sur la population. Mais en fait, c'est la première marche de ces politiques par le haut. La deuxième marche consistera à dire que cette opposition là, c'est le sdf, donc ce sont les anglo bami. La troisième marche sera celle des schémas qui plaisent tant à la communauté internationale: Une guerre ethnique. C'est pourquoi nos frères betis doivent demeurer vigilants. Nous autres qui ne le sommes pas, nous devons être délicat et ne pas nous tromper d'adversaire. Quand on va dans l'arrière-pays Beti, franchement, il n' y a pas de quoi en vouloir à un ressortissant d'une ethnie seulement pour cette apartenance. La récente sortie des chefs sawa, et les accointances des chefferies tribales plus authentiques (grand ouest, grand nord; les chefferies de la fôret n'ayant aucun fondement historique et étant plutôt un machin issu de la colonisation) avec l'autorité politique de fait, on comprend vite que beaucoup affirment représenter le peuple mais pensent d'abord à eux même. Alors merci aux ressortissants de la grande famille tribale de Paul Barthélémy de ne pas se sentir visé. Les Betis forment une entité importante au Cameroun. riche en culture et en personnalité de premier plan qui ont marqué l'histoire de la nation.(Martin Paul Samba, Ossende Afana, Abel Eyinga, Mongo Beti, Jean marc Ela pour n'en citer que quelques uns.) Ceci dit, il me semble personnellement que la violence en l'état actuel des choses n'est pas la solution. Vu le réflexe de la communauté internationale de prendre toujours le parti de ceux qui semblent déjà maîtriser la situation (Togo, Kenya, Tchad), seule une mobilisation générale, disciplinée, large, capable de ne pas répondre aux provocations des forces de répression pourra porter du fruit. N'oubliez pas que la dictature de Marcos aux philippines a été renversée par une foule calme, recueillie, mais déterminée qui a affronté les chars du dictateur. Il faudrait effectivement que l'insurrection soit rapidement sous contrôle, et qu'elle prenne l'option radicale de la non violence. La diaspora aussi doit s'organiser et faire un véritable lobbying. Les grandes capitales européennes doivent voir s'organiser des rassemblements de soutien pour ceux qui se luttent sans violence. Encore une fois, je suis étonné de l'inintellignence scandaleuse de ceux qui nous gouvernent. On en vient à regretter le silence de Biya, car s'ils doit ouvrir la bouche pour débiter les inepties que nous avons entendues hier, on peut penser que la situation du Cameroun est plus catastrophique que ce qu'on peut croire car 25 ans de stupidité gouvernementale ça se paie cher... Pour la paix et pour la justice, que Dieu soit à nos côté.
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