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Constitution: Emeutes à Douala |
YAOUNDE - 25 FEV. 2008 © Stéphane TCHAKAM, Cameroon Tribune |
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La nuit de samedi à dimanche a été mouvementée après l’annulation par le SDF d’une manifestation au quartier Dakar. |
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La nuit tombe sur Douala. Les quartiers Dakar et Village, sur l’axe lourd Douala-Yaoundé, ne vont pas dormir. C’est que les forces de sécurité viennent de quitter Dakar où elles sont venues disperser une manifestation du Social Democratic Front (SDF), explique le gouverneur de la province du Littoral, Faï Yengo Francis. Une fois le secteur bouclé, quelques policiers remontent dans leurs camions pour s’en aller. C’est après leur départ, et à la faveur de la tombée de la nuit, que des centaines et des centaines de jeunes gens installent des barricades sur les routes, incendient des pneus et se livrent à des déprédations. Stations d’essence, véhicules dont un bus de la Socatur, et d’autres biens sont saccagés ou brûlés. Pillages et braquages sont perpétrés dans des habitations et des commerces. Dakar et Village, sur l’axe lourd Douala-Yaoundé, sont particulièrement touchés. Toute la nuit, les forces de sécurité interviennent. Un mort, Gingay Louvert Fouambouh, est enregistré alors qu’un blessé grave, Ngeugang Guetnberg, est interné à l’hôpital Laquintinie, de source policière. 24 personnes sont interpellées.
Tout commence vers 17 heures 45 lorsque le député SDF de Wouri Est, Jean Michel Nintcheu, arrive au rond point Dakar. Voilà près de quatre heures qu’une vingtaine de journalistes attendent sur place. Le député a annoncé un meeting pour protester contre la modification de la Constitution à 14 heures, ce samedi. Près de quatre heures d’horloge après, l’on en est à croire qu’il ne se passera rien. Seule la presse et quelques gendarmes sont visibles à ce carrefour, prolongement du marché Dakar où de nombreuses activités commerciales sont menées. Des curieux s’approchent que l’on entend parler d’une grève prévue le lundi 25 février et de la fermeture par les autorités administratives de la province de radio Equinoxe, après celle de Tv Equinoxe.
Echarpe tricolore de rigueur et accompagné par trois ou quatre militants SDF, Jean-Michel Nintcheu arrive donc enfin. Il est bientôt entouré par un groupe de badauds qui traînent par-là, eux-mêmes attirés par la présence des journalistes et des gendarmes. Un attroupement se forme autour de l’homme politique qui, en quelques minutes, annonce qu’il renonce à la manifestation qu’il avait envisagée pour éviter la violence. Ça ne dure pas cinq minutes. Le député du Social Democratic Front quitte le carrefour à pied, prend la direction du quartier Brazzaville proche, escorté par les jeunes gens qui l’ont écouté. Ils poussent des cris et applaudissent. La circulation est juste un peu gênée.
C’est alors qu’en provenance du marché de Dakar, un camion, un canon à eau de la gendarmerie, débarque au carrefour en pulvérisant des jets d’eau en l’air. Les commerçants assis sur les trottoirs ainsi que tous ceux qui passent par là s’enfuient dans toutes les directions. Des gendarmes arrivent aussi et prennent position. Un autre canon à eau, de la police cette fois, arrive à son tour. Avec des policiers. Ceux-ci investissent la route qui mène à Brazzaville. Des gaz lacrymogènes sont tirés alors que l’un des canons à eau continue de pulvériser en l’air. Il est déjà 18 heures 30. La longue nuit du feu et de la casse commence alors.
Exploitation de la naïveté des jeunes:
la ferme condamnation du gouvernement
Le communiqué de presse du MINCOM.
Dans l’après-midi de samedi 23 février 2008, M. Jean-Michel Nintcheu, député du SDF (Social Democratic Front), président de la coordination provinciale de ce parti dans le littoral, bravant l’arrêté du gouverneur du Littoral en date du 15 janvier 2008 interdisant les manifestations publiques jusqu’à nouvel ordre dans son ressort territorial, a tenté d’organiser un meeting et une marche au lieu dit Rond point Madagascar.
Constatant le nombre insignifiant de militants et sympathisants SDF présents, M. Nintcheu a décidé du report du meeting et de la marche envisagés. Les quelques manifestants présents sur les lieux ont été dispersés par les forces de l’odre, sans incident majeur.
Quelque temps après, au-delà de 18h30mn, au lieu dit Carrefour Bilongue, des bandes de jeunes, à la suite d’un accident de circulation entre un camion remorque et une moto, ont bloqué le trafic ; certains de ces jeunes scandaient « libérez Equinoxe ». Ils ont dressé des barricades allumé des pneus, notamment sur l’axe lourd Douala-Yaoundé, avant d’incendier un bus de la société SOCATUR, de piller les stations services et des call-box.
Les forces de l’ordre sont alors intervenues afin de mettre un terme à cette situation. Les affrontements qui s’en sont suivis ont fait un mort par balle, le nommé Gingay Louvert Fouambouh, et un blessé grave, le nommé Nguegang Gutenberg, actuellement interné à l’hôpital Laquintinie.
Le gouvernement déplore cette perte en vie humaine, ainsi que tous les dégâts occasionnés par ces actes irresponsables. Le gouvernement condamne fermement ceux qui exploitent la naïveté des jeunes pour amener ceux-ci à commettre des actes susceptibles de mettre en danger leurs propres vies, et l’ordre public.
(e) Jean Pierre Biyiti bi Essam
Grossière manipulation
Comme par hasard, une centaine de barrières de feu sont donc tombées du ciel pour atterrir net sur le tronçon Cogefar / Aéroport sur la route Yaoundé / Douala. Il n’y a que des esprits mal tournés pour penser que ce qui s’est passé après l’annulation du meeting est ce qui devait se passer après la marche très pacifique prévue.
Mais à trop se montrer intelligent, ceux qui jouent avec le feu dans l’ombre finissent par laisser des indices sur leurs desseins réels.
Et d’abord sur les lieux des manifestations ou des marches. Depuis le début de l’agitation politico-sociale que l’on relie à une éventuelle révision constitutionnelle, des manifestations ont été programmées à Ndokoti, à Bépanda et, samedi dernier, à Madagascar. Des places qui, d’ordinaire et à toutes les heures du jour, grouillent de monde. Des centaines de jeunes oisifs y tuent le temps comme chargeurs de … taxis ou comme voleurs à la tire ou même comme agresseurs. Nul besoin donc d’organiser une manifestation politique en ces lieux pour y attirer des foules, elles y sont toujours.
Ceux qui prétendent organiser des manifestations à ces endroits font donc plus dans la manipulation de ces couches sociales ouvertes à tous les vents. Ces désoeuvrés trouvent en ces manifestations une occasion comme une autre de s’occuper en cassant ou en volant au prétexte d’une charge des forces de l’ordre.
Ensuite le motif même des manifestations : la révision de la Constitution. Pour un sujet aussi politique, on peut être surpris que les mouvements de protestation se déroulent à la périphérie … de la périphérie. La capitale politique semble mieux se prêter – au moins symboliquement – à de telles joutes. Et quand bien même on viendrait à choisir une ville prétendument frondeuse comme Douala, on comprend mal que de telles manifestations désertent le quartier administratif ou tout au moins le centre ville pour se fondre dans les dédales des quartiers populaires.
Enfin, ces manifestations à la périphérie apparaissent comme des prétextes au déclenchement d’actes de violence préparés. Sur les dernières émeutes de la nuit de samedi à dimanche, il est difficile de comprendre que les organisateurs de la manifestation aient choisi d’annoncer son annulation seulement à la tombée de la nuit. Difficile aussi d’admettre qu’une centaine de barrières de feu aient pu être dressées aussi spontanément dans la nuit sur la voie publique. Alors que la prétendue manifestation n’avait pas attiré des foules.
Dès lors, la déclaration des chefs Sawa du Wouri prend tout son sens. Elle stigmatisait « énergiquement » les « pernicieux phénomènes » qui visent à installer une atmosphère de « malaise quasi permanent » propice aux débordements sociaux.
Une centaine de barrières de feu sur une route, ça marque les esprits, ça laisse des traces visibles et, surtout, ça peut susciter des vocations. Un mauvais climat que certains veulent brandir comme un trophée politique. Ca sent la manipulation.
R. D. LEBOGO NDONGO
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