Manifestants tués
Le gouverneur du Littoral interdit la restitution des corps
Trois jours après la reprise normale des activités, on souffle dans les blocs chirurgicaux, alors que la pression reste constante dans les morgues et au niveau de l’administration des hôpitaux publics.
“ Nous avons reçu instruction ferme de la haute hiérarchie de la province de ne pas encore remettre les corps des manifestants à leurs familles ”, confie un agent de la morgue de l’Hôpital Laquintinie. Et un autre collaborateur de préciser : “Cette instruction ne concerne que les corps déposés par l’armée. En revanche, seuls les corps tombés à la même période et déposés à la morgue par les familles peuvent être récupérés par ces dernières ”. C’est le cas de la dépouille de Ndimah Lovert Fuambuh, 24 ans, que la famille a sorti de la morgue hier lundi 3 mars afin d’organiser ses obsèques. Ce dernier était boucher au marché Madagascar.
Lors des émeutes, il décide alors d’emballer le reste de sa marchandise et d’aller le garder lorsqu’il est happé par une balle perdue. C’est alors que la famille alertée a récupéré le cadavre pour le conserver à la morgue.
A l’hôpital de Bonassama, on justifie cette interdiction du gouverneur Francis Faï Yengo. “ Il est question de faire des analyses balistiques des corps pour déterminer la nature des balles et établir les circonstances de leur tuerie. Car, il faut déterminer les armes utilisées. D’autant plus qu’il peut y avoir des règlements de compte entre civils qui poussent les détenteurs d’armes à s’en servir”, souligne un personnel qui a requis l’anonymat.
Fichier
Pour le nombre de cadavres déposés pendant cette période chaude dans les différentes morgues (Laquintinie, Nylon, Garnison, Logbaba, Déido et New-Bell) aucune langue n’ose se délier. “ C’est une information top secret ”, confie un agent de la morgue de Laquintinie. Le major, quant à lui, nous renvoie à la direction de l’hôpital. Seuls des chiffres approximatifs nous sont fournis. “ On a enregistré une vingtaine de cadavres ”, lance un agent avant d’ajouter : “ Pendant les cinq jours, le travail était très intense; on n’a pas eu une seule minute de répit. En plus, la chambre froide centrale est tombée en panne et on a été contraint de transférer les corps à la chambre froide du fond ”. Toutefois, samedi dernier, une vingtaine de blessés par balles ou par bastonnade y ont été transférés aux urgences dans un état piteux pour recevoir des soins appropriés.
Des indiscrétions font état de ce qu’à la demande du gouverneur de la province du Littoral, les responsables des hôpitaux publics ont remonté hier lundi les statistiques précises des interventions effectuées par leurs différents hôpitaux. Les corps déposés dans les morgues, les blessés enregistrés, traités, hospitalisés et repartis après traitement. Selon certaines indiscrétions émanant de cette cellule de crise, les statistiques de l’hôpital de Bonassama font état de neuf (9) morts reçus, soit un élève en tenue, une ménagère et sept “ probables ” manifestants. Une trentaine de blessés (civils et hommes en tenue) y suivent des soins.
Par Mathieu Nathanaël NJOG Le 04-03-2008 |