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samedi 11 septembre 2004, 21h15
Ismaël Khan, puissant gouverneur de l'ouest afghan, démis de ses fonctions
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KABOUL (AFP) - Le puissant gouverneur de la province d'Herat, dans l'ouest de l'Afghanistan, Ismaël Khan, a été démis samedi de ses fonctions à la tête de la province par le président Hamid Karzaï, faisant craindre une flambée de violence dans la région.
A un mois de l'élection présidentielle historique du 9 octobre, le président Karzaï tente par cette mesure d'étendre son autorité sur la province, qui échappe aujourd'hui en grande partie au pouvoir central et a été le théâtre de combats meurtriers en août.
Ismaël Khan, qui a été nommé ministre des Mines et de l'Industrie le même jour, a indiqué à l'AFP qu'il refusait cette nomination.
"Je n'ai pas de compétences professionnelles pour ce poste, je vais donc devoir décliner. Je ne pourrais pas servir mon peuple à ce poste", a-t-il déclaré.
Les relations entre cet émir autoproclamé, ancien combattant contre les forces d'occupation soviétiques, et le pouvoir central n'ont pas toujours été au beau fixe. Selon certains observateurs à Kaboul, des manoeuvres étaient en cours depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois, pour l'éloigner de sa province.
Tenue d'une main de fer, frontalière avec l'Iran et le Turkménistan, Herat conserve la plus grande partie des taxes à l'importation et à l'exportation, des dizaines de millions de dollars, qu'elle devrait reverser à l'Etat central.
Une offensive déclenchée le 14 août contre des miliciens fidèles à Ismaël Khan par des chefs de guerre opposés, notamment le pachtoune Amanullah Khan, avait indirectement permis à l'armée régulière de se déployer dans la province, pour s'interposer entre les parties.
Les combats, qui ont fait des dizaines de morts, avaient cessé le 17 août, après une médiation de l'ambassade des Etats-Unis.
Selon des observateurs occidentaux, la décision d'Hamid Karzaï pourrait déclencher une nouvelle vague de violence dans la province.
Samedi soir, trois personnes ont été blessées par des soldats de l'armée régulière dans une manifestation de soutien à Ismaïl Khan, selon le chef de la police de Herat Ziaulldin Mahmoodi.
Auparavant environ 300 personnes s'étaient rassemblées dans la rue principale d'Herat, scandant des slogans appelant à la "mort de Karzaï (Hamid Karzaï, président afghan, ndlr) et des Américains", selon un correspondant de l'AFP sur place.
"Les Nations unies appellent toutes les parties concernées à accorder la priorité à la stabilité du pays et des provinces de l'ouest de l'Afghanistan", a déclaré samedi soir dans un communiqué le représentant spécial de l'Onu en Afghanistan, Jean Arnault.
Estimant que les combats de la mi-août auraient "déstabilisé l'ensemble de la région", le représentant de l'Onu a invité les deux nouveaux gouverneurs nommés à Herat et dans la province voisine de Ghor à travailler dans un esprit d'"unité, de tolérance et de réconciliation".
L'ambassadeur américain en Afghanistan, Zalmay Khalilzad, a pour sa part appelé la population de l'ouest à respecter la décision du gouvernement.
"La sécurité, la reconstruction et le développement des institutions démocratiques sont importantes pour tous les Afghans, y compris les habitants de l'ouest, et les droits de tous doivent être respectés", a-t-il dit.
Hamid Karzaï a nommé comme nouveau gouverneur d'Herat l'actuel ambassadeur en Ukraine Sayed Mohammad Khair Khuwa. Un autre technocrate lié au pouvoir central a été nommé à la tête de la province de Ghor.
La révocation d'Ismaël Khan est la dernière en date d'une série de changements d'affectation de responsables militaires et provinciaux, destinés à renforcer l'emprise du pouvoir central sur les provinces afghanes. Celles-ci, plus de deux ans après l'arrivée au pouvoir du gouvernement intérimaire, restent largement sous le contrôle de chefs de guerre et milices locales.
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