ABIDJAN, Côte d'Ivoire (AP) - Rebelles et forces gouvernementales se sont affrontés vendredi dans le centre de la Côte d'Ivoire, au deuxième jour de l'offensive lancée par l'armée régulière après plus d'un an de cessez-le-feu.
La situation est "extrêmement préoccupante", a estimé la ministre française de la Défense, Michèle Alliot-Marie, qui a souhaité que l'ONU "se donne les moyens juridiques" d'assurer sa mission.
Le Conseil de sécurité des Nations unies, qui craint qu'une reprise du confit ne nuise à ses efforts pour la paix dans la région, a exigé le plein respect du cessez-le-feu. Il devait se réunir à nouveau rapidement. Le secrétaire général de l'ONU Kofi Annan a appelé les deux parties "à reprendre immédiatement le dialogue". L'ONU a suspendu toutes ses opérations humanitaires.
Mme Alliot-Marie a confirmé vendredi que les bombardements aériens, lancés la veille sur les fiefs rebelles de Bouaké (centre) et Korhogo (nord), continuaient. Pour la France, où avaient été conclus les accords de paix en 2003 après un an de guerre civile, "une sortie de crise par la violence est irrémédiablement vouée à l'échec", a-t-elle noté.
De son côté, le porte-parole militaire de l'ONU Philippe Moreaux a confirmé qu'un accrochage s'était produit près de la ville de Raviar, à une trentaine de kilomètres au sud du bastion rebelle de Bouaké, dans le centre du pays. "Nous attendons de savoir combien de combattants étaient impliqués et ce qui s'est exactement passé", a-t-il ajouté.
La ville se trouve dans la zone-tampon censée séparer le Nord sous contrôle rebelle et le Sud aux mains des forces gouvernementales. Quelque 6.000 casques bleus et 4.000 soldats français sont déployés sur les lignes de cessez-le-feu.
Selon les rebelles, deux avions de l'armée régulière ont attaqué vendredi la ville de Vavoua, tenue par les insurgés, tirant à la mitrailleuse et larguant des explosifs. On ignore quelles étaient les cibles visées. Vavoua se trouve à l'ouest de Bouaké, qui a été bombardée à cinq reprises jeudi. Ces raids avaient fait au moins 39 blessés graves, dont 14 civils, et probablement des morts, d'après Médecins sans frontières.
Le colonel Henry Aussavy, porte-parole de l'opération militaire française Licorne, a ajouté que des avions avaient tiré des roquettes sur un poste de contrôle d'une autre localité rebelle, Séguéla.
A Bouaké, les habitants se terraient vendredi, ne sortant que pour puiser de l'eau, celle-ci ainsi que l'électricité étant coupée. Le quartier général des rebelles a été détruit, de même que des bâtiments civils et commerciaux. A Korhogo, des véhicules ont été bombardés à un barrage rebelle, d'après l'organisation Human Rights Watch. Des civils auraient été tués.
Mais les forces gouvernementales semblaient déterminées à poursuivre l'offensive pour "libérer le pays", comme l'a lancé le chef d'état-major Matthias Doué, haranguant 3.000 personnes réunies à Abidjan (sud), aux cris de "Tout le monde avec nous!". "Libérez Bouaké!", a répondu la foule.
Des "patriotes", comme se qualifient les partisans du président Laurent Gbagbo, ont attaqué du personnel onusien non armé et brûlé deux de leurs véhicules, selon Human Rights Watch. Ils s'en sont aussi pris à des journaux d'opposition, incendiant au moins trois rédactions ainsi que le siège du Rassemblement des républicains (RDR), d'après des témoins. Reporters sans frontières (RSF) a dénoncé ces violences.
Le quotidien gouvernemental "Fraternité Matin" a enfin fait état de la coupure de lignes électriques et téléphoniques reliant le sud au nord. AP
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