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mardi 9 novembre 2004, 22h19
Côte d'Ivoire: Au moins sept tués parmi des manifestants anti-français
ABIDJAN (AFP) - Au moins sept manifestants ivoiriens ont été tués mardi après-midi à Abidjan après des tirs de sommation de militaires français qui ont provoqué un mouvement de panique dans le quartier de Cocody, où la mobilisation antifrançaise restait forte près de la résidence présidentielle.
"Nous avons pour le moment sept morts et plusieurs blessés dont certains dans un état grave", a indiqué un médecin du Centre hospitalier universitaire de Cocody.
La France a annoncé mardi soir que plusieurs avions avaient été affrétés pour rapatrier les Français "en détresse" qui le souhaitent et ravitailler ceux qui en ont besoin.
La ministre française de la Défense, Michèle Alliot-Marie, a affirmé que "les conditions du survol et du bombardement" de la position militaire française de Bouaké ne laissaient "pas de place au doute" sur une "action délibérée".
Des tirs très nourris ont créé la panique dans le quartier où des dizaines de milliers de personnes étaient venues "exiger" le départ des blindés français positionnés depuis lundi sur le parking de l'Hôtel Ivoire.
Les militaires français ont, après ces tirs, quitté leur position de l'hôtel dont le hall a aussitôt été saccagé par les manifestants.
Des milliers de manifestants se relaient devant l'hôtel depuis lundi matin dans un face à face très tendu avec les militaires français.
Le déploiement d'une cinquantaine de blindés sur le parking de l'hôtel avait attisé la colère des "jeunes patriotes", qui accusaient les forces françaises de chercher à "renverser" le chef de l'Etat ivoirien, dont la résidence se trouve à proximité.
Plus tôt mardi, le ministère ivoirien des Affaires sociales a déclaré qu'au moins 30 Ivoiriens avaient été tués depuis samedi dans les violentes manifestations qui secouent Abidjan.
"C'est l'armée française qui les a tués, nous n'avons pas encore fait le bilan qui sera plus lourd", a affirmé un responsable de ce ministère.
Depuis samedi, les affrontements qui opposent forces françaises et "jeunes patriotes" partisans du régime de Laurent Gbagbo ont fait plus de 600 blessés, dont certains par balle, selon le Comité international de la Croix rouge (CICR).
"Notre priorité immédiate a été de ramener le calme mais à l'heure où je vous parle, la situation reste précaire et je crains qu'elle ne se tende", a déclaré mardi à Paris le Premier ministre français Jean-Pierre Raffarin.
"Notre vigilance doit donc être totale. Le sort de nos compatriotes est bien évidemment notre priorité absolue", a-t-il poursuivi, insistant sur le fait que "la crise qui secoue la Côte d'Ivoire n'est en aucune façon un tête-à-tête entre la France et la Côte d'Ivoire" et que Paris a pour "seul but d'éviter la guerre civile".
De son côté, Washington a appelé M. Gbagbo a faire "immédiatement cesser toute forme de violence autorisée par le gouvernement ivoirien contre des citoyens de Côte d'Ivoire et les forces de maintien de la paix envoyées par les Nations unies".
Depuis samedi, quelque 1.000 étrangers ont été mis en sécurité dans des camps de l'Opération des Nations unies en Côte d'Ivoire (Onuci) et 1.300 autres ont été hébergés à la base militaire française d'Abidjan.
Les pillages et violences antifrançaises à Abidjan avaient débuté peu après la neutralisation samedi de "tous les moyens aériens" des forces ivoiriennes par la force française Licorne, en riposte à une attaque gouvernementale qui avait tué neuf militaires français à Bouaké (centre).
L'ambassadeur de Côte d'Ivoire à l'Onu, Philippe Djangone-Bi, a assuré que ce bombardement n'avait pas été intentionnel et a accusé la France de s'être livrée à "des actes de représailles unilatérales" caractérisés par "un usage excessif de la force". A ce titre, il a annoncé avoir saisi le Conseil de sécurité pour qu'il condamne Paris.
Les bombardements effectués par l'armée entre jeudi et samedi dans le nord du pays ont fait, en outre, "au moins 85 morts", a affirmé à Bouaké le dirigeant de la rébellion nordiste Guillaume Soro.
La nuit de lundi à mardi s'était déroulée sans incidents majeurs, des patrouilles mixtes de Casques bleus, de soldats français et de militaires ivoiriens ayant parcouru les quartiers sud de la ville.
Dans le sud-ouest, des renforts français tentaient d'entrer dans la localité de San Pedro, où quelque 200 Français, victimes de pillages, se disaient "menacés de mort" selon le consul honoraire de France. Dans la ville de Gagnoa (ouest), les populations locales bétés (ethnie de M. Gbagbo) s'en sont pris aux nordistes, faisant au moins 15 morts, a affirmé M. Soro.
Depuis Genève, l'Onu a appelé le gouvernement ivoirien à rétablir l'électricité, et donc l'eau, dans les zones nord tenues par les rebelles. A l'hôpital de Korhogo, quatre personnes sont décédées depuis jeudi en raison de cette situation précaire, selon des sources hospitalières.
Mandaté par l'Union africaine, le président sud-africain Thabo Mbeki s'est déclaré "encouragé" par l'engagement de son homologue ivoirien à appliquer les accords de paix, après une rencontre mardi avec M. Gbagbo à Abidjan.
M. Mbeki doit rencontrer le 17 novembre à La Haye la présidence néerlandaise de l'Union européenne.
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