PORT-AU-PRINCE (AFP) - Le nouveau Premier ministre haïtien Gérard Latortue est arrivé mercredi en provenance de Miami à Port-au-Prince où les soldats américains ont fait usage de leurs armes dans la nuit de mardi à mercredi.
Choisi mardi par un Comité de sept sages, confirmé par le président provisoire haïtien Boniface Alexandre, Gérard Latortue, sans assise politique, doit former un gouvernement d'union nationale dont la composition est espérée avant la fin de la semaine, et conduire le pays à des élections parlementaires.
"Je suis très heureux de voir la confiance placée en moi par le Comité des sages", avait déclaré Gérard Latortue à l'annonce de sa nomination. "Je voudrais rassembler tous les Haïtiens et Haïtiennes quelles que soient leur origine sociale, leur idéologie ou orientation politique en cette année du bicentenaire de notre indépendance", avait-il ajouté.
Peu après son arrivée vers 16h00 (21h00 GMT) à l'aéroport de Port-au-Prince en provenance de Miami (Floride, sud-est des Etats-Unis), il a tenu une conférence de presse dans laquelle il a proné "un grand gouvernement de consensus national où l'on fera appel aux Haïtiens sur la base de la compétence, de l'intégrité et de l'engagement démocratique".
"Nous nous donnons jusqu'au week-end pour former le gouvernement", a déclaré Paul-Emile Simon, l'un des sept sages. "L'Organisation des Etats Américains (OEA) a estimé qu'il faudra un minimum de neuf mois" pour organiser des élections parlementaires, a relevé un autre sage, Ariel Henry.
Le nouveau Premier ministre "a la capacité de monter une équipe cohérente qui travaillera dans l'unité" et il "est capable de créer un dialogue national", a-t-il estimé.
Dans la capitale, où la situation reste tendue, plusieurs fusillades ont éclaté entre des Marines et des tireurs inconnus, notamment dans la zone de la résidence du Premier ministre. "Il y a eu trois attaques cette nuit, et dans les trois cas, les Marines ont répondu à des tirs", a indiqué mercredi à l'AFP, le commandant Richard Crusan, porte-parole militaire américain.
Durant l'une de ces attaques, il y a peut-être eu deux tués, mais quand les Marines sont retournés sur le lieux, il n'y avait pas de corps, a-t-il précisé.
Les forces américaines ont aussi annoncé qu'elles avaient commencé avec la police haïtienne à confisquer des armes. "Nous prendrons toutes les armes que nous trouverons dans la rue" et "désarmerons toute personne illégalement armée", a souligné un officier américain, en reconnaissant que les Haïtiens avaient toujours le droit de posséder une arme chez eux.
Mardi, dans le grand bidonville de Cité-soleil, des jeunes armés se disaient prêts à rencontrer les Marines pour échanger leurs armes contre des aides humanitaires.
Les Nations Unies ont envoyé une première mission pour étudier le déploiement de la force multinationale de stabilité qui remplacera la force multinationale intérimaire actuelle, commandée par les Américains.
L'avocat français de Jean Bertrand Aristide, Me Gilbert Collard, a annoncé qu'il allait porter plainte dans les prochains jours contre les ambassadeurs français et américain à Port-de-Prince, Thierry Burkard et James Foley, accusés d'avoir participé à l'"enlèvement et la séquestration" de son client.
L'ancien ambassadeur français Yves Gaudel, de même que l'écrivain Régis Debray et la soeur du ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin, Véronique Albanel, sont aussi concernés par la plainte.
Le ministère français des Affaires étrangères a annoncé que Régis Debray effectuera une nouvelle mission d'information en Haïti à partir de jeudi à la demande de Dominique de Villepin.
A Bangui, où se trouve Jean Bertrand Aristide depuis le 1er mars, une délégation sud-africaine a indiqué qu'il n'était "pas sûr" que Pretoria accueille le président haïtien déchu. Cette hypothèse est "fortement envisagée", a toutefois déclaré un responsable centrafricain.