BAGDAD (Reuters) - Bagdad semblait désertée par les forces irakiennes lors de l'entrée mercredi
dans le centre-ville des chars américains, mais les dirigeants américains et britanniques soulignent que
le conflit n'est pas pour autant fini.
Un porte-parole militaire américain a rappelé notamment que Tikrit, ville natale du président
Saddam Hussein, pourrait être le théâtre d'une résistance semblable à celle rencontrée dans d'autres
villes irakiennes.
Des scènes de pillage et de liesse ont accompagné l'entrée au coeur de la capitale des premiers
marines américains venus de l'Est. Des pillards ont entrepris de vider certains bâtiments
gouvernementaux sans qu'aucun représentant des forces de l'ordre irakiennes ne soit en vue. Les
soldats américains ne sont pas non plus intervenus.
Des marines ont par ailleurs pris le contrôle de ce qu'ils ont qualifié de quartier général de la
police secrète irakienne, selon un envoyé spécial de Reuters qui a pénétré dans le bâtiment. Le siège
de la Direction de la sécurité générale, situé dans l'est de la capitale, était en train d'être pillé quand
les soldats sont arrivés.
A Bagdad, sur une place du centre-ville, une centaine d'Irakiens se sont rassemblés autour d'une
statue monumentale à l'effigie du président irakien et, après avoir arraché la plaque métallique se
trouvant sur son piédestal de marbre, ont entrepris, avec difficulté, de la faire tomber avec l'appui
d'un blindé américain, rapportent des témoins.
Une douzaine de chars américains Abrams ont été déployés sur cette place proche de l'hôtel
Palestine, abritant la plupart des journalistes étrangers couvrant le conflit dans la capitale irakienne.
Selon l'envoyé spécial de Reuters Khaled Yacoub Oweis, peu de coups de feu ont été entendus durant
la percée des forces américaines, venues de la rive gauche du Tigre, dans l'est de la capitale.
PAS D'OPTIMISME EXCESSIF
Selon Oweis, "la chute de Bagdad est achevée".
Le président américain George W. Bush s'est dit encouragé par les "très bons" progrès des forces
américaines mais a ajouté que la guerre n'était pas finie, a indiqué son porte-parole. Le
vice-président, Dick Cheney, a évoqué l'effondrement de l'autorité centrale irakienne dans le centre
de Bagdad, tout comme l'avait fait peu auparavant le gouvernement britannique.
L'armée américaine estime que l'Irak a atteint un "point de basculement", la rue irakienne
commençant à se rendre compte que le régime de Saddam Hussein vit ses derniers instants.
"Il s'agit d'un moment très important dans l'opération. Cependant, sur le plan militaire, nous nous
basons sur l'hypothèse que ce n'est pas fini", a déclaré le général Vincent Brooks au commandement
central. "Le régime ne s'est pas totalement effondré."
De fait des tireurs irakiens opéraient encore dans les rues de Bagdad sur la rive orientale du
Tigre, dans un quartier où les forces américaines n'ont pas encore pénétré, rapporte l'envoyé spécial
de Reuters Hassan Hafidh. Oweis a pour sa part qualifié ce secteur d'"instable", affirmant que des
miliciens irakiens tiraient à partir de bâtiments bordant une grande artère et que des pillages étaient
en cours.
Brooks a précisé par ailleurs que les forces américaines étaient en train d'évaluer l'ampleur des
forces irakiennes à Tikrit, où la résistance pourrait selon lui s'appuyer sur les forces régulières
irakiennes, les milices et les fidèles du parti Baas au pouvoir.
Ailleurs dans le pays, un envoyé spécial de Reuters à Arbil, ville du Nord irakien contrôlée par les
Kurdes, a constaté des scènes de liesse suscitées par la rumeur d'une désintégration avancée du
régime de Saddam Hussein.
Le chancelier allemand Gerhard Schröder a salué les "signes encourageants" indiquant la fin
prochaine du conflit et a réitéré sa position selon laquelle l'Onu devrait jouer un rôle central dans la
stabilisation du pays.