BAGDAD, 31 mai 2006 (AFP) - L'état d'urgence a été déclaré pendant un mois mercredi à Bassorah, capitale méridionale de l'Irak saisie par la violence, tandis que le Haut tribunal pénal irakien a décidé de tenir sa prochaine audience le 5 juin dans le procès du président déchu Saddam Hussein.
La violence a continué d'ensanglanter le pays avec la découverte de 40 corps et la mort de 22 personnes mercredi, au lendemain d'une journée particulièrement sanglante au cours de laquelle 53 personnes avaient péri.
"Nous espérons, à travers la mobilisation des services de sécurité pendant un mois et le dialogue avec les différents protagonistes, venir à bout de la crise" à Bassorah, située à 550 km au sud de Bagdad, a déclaré le Premier ministre Nouri al-Maliki qui visitait la ville pour la première fois depuis sa prise de fonction le 20 mai.
En s'adressant dans la matinée aux responsables locaux, M. Maliki a menacé de frapper d'une main de fer les auteurs de violences qui se sont multipliées dans la ville sur fond de rivalités interchiites pour le contrôle de la contrebande lucrative de produits pétroliers.
"Nous avons pour responsabilité de nous dresser devant tous ceux qui violent les droits de l'Homme", a-t-il averti.
"La sécurité d'abord, la sécurité ensuite et toujours", a-t-il martelé au début de sa visite. Le vice-président sunnite, Tarek al-Hachémi, qui l'accompagnait, a annoncé la mise en place de points de contrôle pour saisir les armes non autorisées et rétablir le calme à Bassorah.
Les corps de quarante personnes assassinées et certaines portant des marques de torture ou décapitées ont été découverts dans Bagdad, ses environs et au nord de la capitale, selon des sources de sécurité.
Les enlèvements et les exécutions sommaires se sont multipliées depuis une attaque, en février, contre un mausolée chiite dans la ville sunnite de Samarra, qui a été suivie par des violences meurtrières entre chiites et sunnites.
En outre, 22 personnes ont été tuées dans la journée, dont neuf mercredi soir dans une attaque au mortier contre des habitations du quartier de Doura, dans le sud de Bagdad.
Un journaliste sportif de Iraqia, Jaafar Ali, a également été abattu, ce qui porte à 11 le nombre de reporters de cette chaîne publique assassinés en Irak depuis l'invasion de mars 2003, selon l'organisation Reporters sans frontières.
Entre-temps à Bagdad, les avocats de la défense du président déchu et de sept de ses lieutenants jugés pour le meurtre de 148 villageois chiites de Doujaïl, ont demandé en vain une suspension du procès devant le Haut tribunal pénal irakien, après avoir accusé le procureur général d'avoir suscité des témoignages à charge.
"La procédure doit être suspendue jusqu'à la clarification de cette affaire", a déclaré un avocat de la défense qui soutient, en se basant sur des déclarations de témoins, que le procureur général, Jaafar al-Moussaoui, s'était rendu à Doujaïl, au nord de Bagdad, pour demander à des habitants de déposer contre les anciens dirigeants irakiens, avant le procès.
A l'appui de ses accusations, la défense a montré un document vidéo sur cette visite, mais le procureur a affirmé que la personne montrée n'était pas lui et le juge a retenu sa version.
Plusieurs témoins de la défense ont été arrêtés mercredi soir, sur ordre du Haut tribunal pénal irakien, a indiqué un responsable américain sans préciser leur nombre.
La chaîne de télévision Al-Arabiya a évoqué quatre arrestations.
"Ils ont été arrêtés dans le cadre d'une enquête sur leurs accusations contre le procureur général Jaafar al-Moussaoui, afin de s'assurer qu'ils restent à Bagdad", a indiqué le responsable américain, précisant qu'ils n'étaient pas inculpés.
Le Tribunal, qui a auditionné mercredi cinq témoins, a fixé au 5 juin sa prochaine audience.
George W. Bush s'est dit "troublé" mercredi par les soupçons de massacre de civils qu'auraient perpétré les Marines dans une ville d'Irak, et a assuré que les coupables seraient punis si les faits potentiellement désastreux pour l'armée américaine étaient vérifiés.
"Je suis troublé par les premières informations" rendues publiques, a dit M. Bush dans sa première réaction à l'affaire de Haditha.
Au moins 24 civils irakiens ont été tués le 19 novembre 2005 dans cette localité à 260 km à l'ouest de Bagdad. Selon la version initiale fournie par les Marines, ils ont péri dans l'explosion d'un engin dissimulé en bord de route.