TEL-AVIV,
correspondance particulière. – « Yasser Arafat n’a pas de police d’assurance.
Il ne peut pas se sentir en sécurité là où il se trouve. »
Interviewé par les médias israéliens à l’occasion de la fête de Pessah
(les Pâques juives qui débutent lundi), Ariel Sharon n’a pas caché son
intention de concrétiser son projet d’en finir avec le président de l’Autorité
palestinienne.
Le Hezbollah visé
Dans la foulée, le Premier ministre a également proféré des
menaces à peine voilées à l’égard du cheikh Hassan Nasrallah, le leader
spirituel du Hezbollah libanais dont l’organisation est accusée par l’Etat
hébreu d’aider financièrement et techniquement certaines cellules palestiniennes
opérant dans les territoires.
Aux journalistes qui lui demandaient si Arafat et Nasrallah risquaient
d’être « éliminés », Sharon a déclaré qu’il « ne leur suggère
pas de se sentir en sécurité ». « Quiconque tue des Juifs, ordonne
d’en tuer, ou menace des Israéliens est un homme marqué. Point à la ligne
», a-t-il ajouté en refusant cependant de préciser quand ces menaces
pourraient être mises à exécution.
Certes, depuis le déclenchement de l’Intifada, Sharon a déjà menacé la
vie d’Arafat à plusieurs reprises. A la demande de ses ministres « ultra
», le gouvernement israélien a d’ailleurs déclaré le président de l’AP
« candidat à l’expulsion ». Mais ce projet n’a jamais été mis a
exécution en raison de l’opposition de la communauté internationale et
surtout de la Maison-Blanche. Or, tout à changé depuis que l’administration
américaine s’est empêtrée en Irak. Moins attentif à ce qui se passe en
Cisjordanie et dans la bande de Gaza, Georges Bush laisse désormais son
allié agir plus librement et celui-ci en profite (1). Après la
« liquidation » du cheikh Ahmed Yassine, rien ne l’empêche donc d’envisager
sérieusement la suppression du leader palestinien.
En attendant, le Premier ministre israélien a également profité de cet
interview pour annoncer que l’évacuation de la Bande de Gaza serait probablement
achevée au printemps de 2005 et pour révéler son intention d’expulser
tous les Palestiniens résidant illégalement en Israël lorsque le « mur
de séparation »
serait entièrement construit. C’est-à-dire à la fin de cette année.
Ses propos ainsi que la création, jeudi, d’une nouvelle colonie juive
sauvage (quinze familles) au coeur du quartier de Silwan (Jérusalem-Est)
sont sans doute pour beaucoup dans le déclenchement, hier, d’une nouvelle
émeute sur l’Esplanade des mosquées.
Charge policière
Les incidents ont éclaté à l’issue de la grande prière, lorsque
des milliers de musulmans ont attaqué à coups de pierres des fidèles juifs
qui étaient, eux, réunis devant le Mur des lamentations. Présente en masse
à l’extérieur de la mosquée, la police a aussitôt chargé la foule à l’aide
de grenades lacrymogènes et de balles en caoutchouc. Les incidents ont
duré plusieurs heures et ont été extrêmement violents. Quinze personnes
ont été blessées parmi lesquelles plusieurs membres des forces de l’ordre
et quatorze jeunes protestataires ont été arrêtés.
Serge DUMONT
1. – Les Etats-Unis ont réagi hier soir en demandant à Israël
de ne pas s’en prendre au dirigeant palestinien.
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