Le vendredi 27 octobre 2006
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Des gens tirent un procectile artisanal dans les rues de Oaxaca. Photo AP
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Oaxaca en situation quasi-insurectionnelle
Bertrand Rosenthal
Agence France-Presse
Mexico
Deux morts, dont un cameraman américain, et 11 blessés par balle, accès routiers fermés, barricades dans les rues, Oaxaca au sud du Mexique vivait vendredi soir une situation quasi-insurectionnelle après plus de quatre mois de protestation d'enseignants en grève.
Brad Will, de la chaîne indépendante Indymedia, a été tué «d'une balle dans la poitrine», a déclaré à l'AFP Florentino Lopez, porte-parole de l'Assemblée Populaire des Peuples de Oaxaca (APPO). Le commandant de la croix rouge de Oaxaca Javier Perez a confirmé que le journaliste américain était décédé à son arrivée à sa clinique.
Florentino Lopez qui demande depuis le début du mouvement la démission du gouverneur de l'État Ulises Ruiz, accusé de corruption, a de nouveau fait appel vendredi au président mexicain Vicente Fox pour qu'il démissionne.
Il y a eu vendredi au moins 12 affrontements en ville et en périphérie.
Les tirs sont partis du toit du palais municipal de Santa Lucia del Camino (15 km de Oaxaca), où s'étaient repliés les policiers et les hommes de main d'Ulises Ruiz qui avaient tenté de prendre une barricade», a ajouté le responsable de l'APPO.
«Un enseignant, blessé par balle, vient de mourir et une institurice est grièvement blessée», a annoncé de son côté à la radio un autre dirigeant de l'APPO Flavio Sosa.
Le corps de l'instituteur Emilio Alonso avait trois impacts de balle. Il se trouvait sur une barricade face au bureau du gouverneur, à San Bartolo Coyotepec, à 15 km de Oaxaca, a raconté son épouse à la radio locale de l'Université.
Onze autres personnes ont également été blessées, dont un photographe du journal Milenio, Oswaldo Ramírez.
Selon le correspondant local de l'AFP, beaucoup de gens rejoignaient les barricades vendredi soir. Les quatre principaux accès routiers de la ville ont été fermés. Il y a des barrages aux croisements des avenues les plus importantes, des autobus et des voitures renversés, des remblais de terre. Les manifestants brûlent des pneus et des ordures.
Le service de bus était pratiquement suspendu vendredi soir.
Le conflit à Oaxaca, initialement pour une revalorisation salariale, avait débuté le 22 mai, puis s'était radicalisé le 14 juin, avant de s'étendre à d'autres secteurs de la société lorsque le gouverneur avait envoyé en vain la police anti-émeute pour lever le blocus des instituteurs.
L'APPO, qui regroupe les 70 000 instituteurs de l'État de Oaxaca et des organisations sociales, occupe le centre d'Oaxaca depuis le 22 juin. Chaque nuit des barricades sont dressées pour éviter une éventuelle intervention des forces de l'ordre pour les déloger.
Le gouvernement mexicain a cherché jusqu'à présent à régler le conflit par la négociation, avant la prise de fonction le 1er décembre du nouveau président Felipe Calderon.
Les enseignants devaient décider ce week-end la fin de la grève qui affecte 1,3 millions d'élèves.
Avant les incidents de vendredi, le bilan du mouvement de protestation dans l'État de Oaxaca, un des plus pauvres du Mexique, était de cinq morts et de nombreuses arrestations ont eu lieu dans les rangs des manifestants.