11/05 19:29 Le massacre de centaines de Musulmans par des milices chrétiennes le 2 mai à Yelwa (centre) a provoqué une onde de choc au sein de la communauté islamique notamment à Kano (nord) où les chefs religieux ont lancé un ultimatum donnant sept jours au président Olusegun Obasanjo pour punir les coupables.
Mardi après midi, le président Obasanjo a reçu des chefs musulmans à Abuja et leur a promis d'intervenir dans la crise inter-communautaire qui secoue l'état central du Plateau.
"Tout ce qui doit être fait sera fait, ceux qui doivent être punis seront punis, parce que nous ne pouvons autoriser l'installation du chaos", a-t-il déclaré, en présence de journalistes.
"Nous n'allons pas laisser la situation dans l'état du Plateau se détériorer, nous avons perdu assez de vies inutilement", a-t-il ajouté.
Une manifestation a rassemblé environ 10.000 personnes, mardi à Kano, la grande ville du nord à majorité musulmane, avant de dégénérer en émeute. Au moins dix personnes ont été tuées et cinq magasins incendiés, a constaté un journaliste de l'AFP.
"Partout les voyous veulent faire règner leur loi. Ils arrivent en grand nombre de différents quartiers de la ville et nous essayons de les disperser avec tous les hommes à notre disposition qui ont été déployés", a expliqué le commissaire Abdul Ganiyu, chef de la police de Kano.
La petite minorité chrétienne qui vit à Kano a déjà été dans le passé victime de violences.
Au cours de la manifestation, des effigies du président américain George W. Bush, du Premier ministre israélien Ariel Sharon et de Joshua Dariye, gouverneur de l'état du Plateau où se trouve Yelwa, avaient été brûlées.
"Nous lançons ici un ultimatum de sept jours au Président Obasanjo pour prendre des mesures effectives et mettre fin à ces tueries sinon il portera la responsabilité de tout ce qui pourrait arriver à l'issue de cet ultimatum", a déclaré aux manifestants Umar Ibrahim Kabo, président du Conseil des Oulémas, les docteur de la foi et président de la Commission de l'état de Kano pour la Charia, la loi islamique.
"Si ces tueries qui ont lieu dans le monde entier et au Nigeria, visent à intimider les Musulmans, nous voulons assurer aux coupables que cela va seulement nous excéder", a lancé Ibrahim Shekarau, le gouverneur de Kano, à la foule qui scandait "Allah'u Akbar", "Dieu est grand".
"En tant que Musulmans (...) nous sommes prêts à vivre en paix et à respecter la loi, mais si nos vies et notre honneur sont bafoués, nous sommes prêts à nous sacrifier pour les protéger", a-t-il ajouté.
Annonçant une prochaine visite dans l'état du Plateau, M. Obasanjo a estimé que "la situation a atteint un tel degré qu'elle mérite une solution durable... Je vous demanderai juste un peu de temps".
Il a également invité les Musulmans au calme et à ne pas chercher à se venger, sinon "ce pays sera à feu et à sang".
Il a affirmé que les Nigérians sont les premiers responsables de ces conflits et qu'on ne peut en accuser "les Etats Unis, l'Arabie Saoudite ou la Grande Bretagne".
Le 2 mai, des membres de l'ethnie chrétienne des Tarok ont attaqué une communauté musulmane à Yelwa, dans le comté de Shendam du Plateau, une ville commerçante située à 300 km à l'est d'Abuja.
Cette attaque a fait selon un bilan officiel entre 200 et 300 morts, mais des témoins interrogés sur place par l'AFP et un responsable de la Croix Rouge nigériane ont estimé à plus de 600 le nombre de victimes.
"Les tueries du comté de Shendam font partie de la guerre globale menée par l'Occident contre l'Islam et Dariye est le bras armé qui exécute un génocide planifié de longue date des Musulmans du Nigeria", a affirmé M. Kabo.
Depuis 2000, l'Etat de Kano a instauré la Charia, comme onze autres Etats du nord du Nigeria.
Les Tarok sont principalement des agriculteurs sédentaires chrétiens, tandis que leurs rivaux Haoussa et Fulani sont plus souvent des éleveurs, parfois nomades, dont les animaux sont susceptibles de menacer les récoltes. Les deux groupes revendiquent des droits ancestraux sur les terres du centre du pays et s'affrontent régulièrement.
Au Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique avec 130 millions d'habitants, on estime à 10.000 le nombre total de victimes de violences interethniques depuis l'élection à la présidence de M. Obasanjo en 1999.
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