ISLAMABAD (Reuters) - La police pakistanaise a fait usage de grenades lacrymogènes et de balles de caoutchouc dimanche à Islamabad pour disperser une manifestation interdite contre les caricatures du prophète Mahomet.
Echaudé par les débordements et les violences qui ont émaillé des manifestations similaires dans le pays, le gouvernement fédéral avait annoncé la veille qu'il ne tolérerait plus aucun rassemblement dans la capitale.
Mais le Muttahida Majlis-i-Amal, principale alliance islamiste du pays, avait maintenu son appel à défiler dimanche après-midi.
Le président du mouvement, Qazi Hussain Ahmed, a été arrêté dimanche et placé en résidence surveillée à Lahore, dans l'est du Pakistan, avant qu'il puisse se rendre à Islamabad où il devait conduire le cortège.
Un autre dirigeant de cette coalition de six formations islamistes, Fazul-ur-Rehman, et une trentaine de ses partisans, dont des parlementaires, ont été contraints par la police de se disperser alors qu'ils s'étaient regroupés à l'une des principales entrées d'Islamabad.
Des scènes similaires se sont répétées dans la ville, quadrillée par les forces de l'ordre qui ont multiplié les contrôles à bord d'autocars et fouillé des véhicules.
Un millier de personnes ont réussi à passer au travers du dispositif de sécurité pour se rassembler près du bazar central.
"La nation pakistanaise tout entière continuera, le monde musulman continuera à descendre dans les rues tant que nous n'aurons pas obtenu une excuse pour cet acte sinistre et la promesse qu'il ne se reproduira pas", a déclaré Fazul-ur-Rehman.
Dans la ville voisine de Rawalpindi, où des sympathisants du MMA ont incendié des pneus, la police a procédé dans la matinée à une centaine d'arrestations.
Le gouvernement fédéral a interdit cette manifestation samedi à la suite des violences qui ont marqué de précédents rassemblements et fait au moins cinq morts au cours de la seule semaine écoulée.
Dans le même temps, il a adressé une série de protestations diplomatiques aux pays européens dont des journaux ont publié les caricatures et rappelé vendredi son ambassadeur au Danemark, où ces dessins jugés blasphématoires par la communauté musulmane sont parus la première fois, en septembre dans le quotidien Jyllands-Posten.
Copenhague a annoncé dimanche qu'il avait à son tour rappelé son ambassadeur en poste à Islamabad. Dans un communiqué, le ministère des Affaires étrangères précise qu'il s'agit d'un retrait temporaire. "Il est devenu pratiquement impossible pour l'ambassadeur de faire son travail dans les circonstances actuelles", explique le ministère.
Vendredi, la représentation diplomatique du Danemark à Islamabad avait dû être fermé en raison d'une alerte à la sécurité.
La publication des caricatures a provoqué une vague d'indignation dans le monde musulman. Les manifestations ont été parfois violentes comme en Libye, où 11 personnes sont mortes, et au Nigeria, où 15 personnes ont trouvé la mort samedi. Les autorités avaient auparavant fait état de 16 victimes.
Dans une tribune publiée dimanche dans le Washington Post, le responsable du service culture du Jyllands-Posten, Flemming Rose, explique qu'il n'a jamais voulu manquer de respect à l'islam.
"Nous n'avions certainement pas l'intention de provoquer des manifestations violentes dans le monde musulman. Notre but était simplement de repousser les limites de la liberté d'expression qui semblaient en voie de restriction", écrit-il.