KINSHASA (AFP) - Les élections présidentielle et législatives de dimanche en République démocratique du Congo (RDC), premiers scrutins libres en plus de 40 ans dans le pays, s'annoncent dans un climat tendu, après des violences meurtrières jeudi et un nouvel incident armé vendredi à Kinshasa.
Un soldat affecté à la sécurité du vice-président congolais Azarias Ruberwa, candidat à la présidentielle, a été tué par balles et deux autres blessés vendredi après-midi au moment où leur convoi a croisé le cortège du président Joseph Kabila sur la route menant à l'aéroport de Kinshasa, a indiqué l'Onu.
"Ils faisaient partie d'une escorte qui allait chercher le vice-président à l'aéroport. On ne connaît pas les circonstances de cet incident", a déclaré Kemal Saïki, porte-parole de la Mission de l'Onu en RDC (Monuc). Le porte-parole de M. Ruberwa, Pascal Masireka, a accusé les éléments de la garde présidentielle d'avoir "ouvert le feu sur l'escorte du vice-président". Cette version n'a pas été confirmée de source policière ou militaire.
Cet accrochage survient au lendemain de violences qui ont fait quatre morts, dont trois policiers, aux abord d'un stade de Kinshasa où le vice-président Jean-Pierre Bemba, candidat à la magistrature suprême, tenait un meeting. M. Bemba a condamné vendredi "avec fermeté" ces violences. "Il n'est pas dans l'intérêt de notre parti d'accepter de tels débordements qui ont terni la fête", a-t-il dit.
La police, qui avait donné des consignes de "retenue" à ses hommes, estime avoir "évité un bain de sang". "La police, non armée, (...) a fait son travail avec professionnalisme. Ca aurait pu être beaucoup plus grave", a déclaré le numéro 2 de la Monuc, Ross Mountain. Il a souligné que cette "chaude" journée ne devait pas éclipser l'enjeu des élections pour "une population qui attend depuis tellement longtemps (...) cette occasion de choisir librement ses dirigeants".
Le président de la Commission électorale indépendante, Apollinaire Malu Malu, a averti que "les rassemblements et autres manifestations à caractère politique ou de campagne ne seront pas autorisées" après la fin officielle de la campagne vendredi à minuit.
Le président sud-africain Thabo Mbeki a, de son côté, appelé à la tenue d'élections "calmes" et "pacifiques", jugeant qu'elles sont d'une "importance historique pour l'avenir de l'Afrique". Au Nord-Kivu (est), deux personnes ont été tuées jeudi soir près de Rutshuru dans l'attaque par des hommes armés du convoi de partisans de Venant Tshipasa, ministre congolais des Affaires foncières et candidat aux législatives. Selon le chef militaire de la province du Nord-Kivu, le général Gabriel Amisi, cette attaque est le fait de "coupeurs de route".
Plus de 25 millions d'électeurs sont appelés à départager 33 candidats au premier tour de la présidentielle, combiné avec des législatives à un seul tour où 9.707 prétendants se disputeront 500 sièges. Tout dérapage du processus pourrait replonger le pays dans le chaos, alors qu'un succès électoral ouvrirait la voie à la relance de l'économie d'un pays ruiné mais potentiellement moteur de l'Afrique centrale.
A deux jours du vote, le grand favori du premier tour de la présidentielle reste Joseph Kabila (35 ans), qui a promis développement et sécurité au cours d'une campagne marathon qui s'est achevée vendredi soir par un meeting à Kinshasa, en présence de milliers de personnes. Ces scrutins seront placés sous la surveillance de 80.000 policiers congolais, 17.600 Casques bleus et d'un millier de soldats européens, qui n'interviendront qu'en cas de "troubles graves".
Vendredi, un drone belge de la force européenne (Eufor), déployée à Kinshasa s'est écrasé dans le quartier de Kingabwa (nord-est), faisant 6 blessés légers, selon Eufor. La régularité des opérations électorales sera scrutée par 47.000 observateurs nationaux et 1.500 internationaux, ainsi que plus de 193.000 témoins de partis politiques et de candidats indépendants.