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mardi 13 septembre 2005, 19h04
Belfast: troisième nuit d'émeutes, le fossé se creuse entre les communautés
BELFAST (AFP) - Les braises du conflit restaient vives mardi en Irlande du Nord après une troisième nuit consécutive d'émeutes dans les fiefs populaires protestants, la réconciliation entre les communautés semblant plus éloignée que jamais.
Plus de 60 policiers ont été blessés depuis samedi, même si l'intensité de la violence semble avoir diminué dans la nuit de lundi à mardi.
Les militants loyalistes, fidèles à la couronne britannique, manifestent leur colère depuis samedi parce que les autorités ont interdit à une marche de la confrérie protestante de l'ordre d'Orange de traverser un quartier catholique hostile.
Lundi soir, des centaines de jeunes loyalistes ont encore bombardé la police de cocktails Molotov et autres projectiles dans les quartiers nord, est et ouest de Belfast, comme dans plusieurs villes de banlieue.
Les policiers et les soldats britanniques ont riposté en utilisant leur canon à eau mais sans tirer ni à balles réelles ni avec des balles en plastique, comme ce fut le cas samedi et dimanche. Au total 63 émeutiers ont été interpellés depuis samedi.
De nombreuses carcasses de véhicules encore incandescents jonchaient le sol de la plupart des fiefs loyalistes mardi, vestiges des émeutes de la nuit.
Mais "la tension a beaucoup diminué dans les rues dans la nuit de lundi", a estimé Chris Kerr, porte-parole des pompiers de Belfast qui ont enfin pu intervenir sous protection policière.
Mardi après-midi, l'un des principaux groupes armés protestants nord-irlandais a appelé à mettre un terme aux émeutes.
Dans un communiqué, l'Association de défense de l'Ulster (UDA) a demandé à ses militants "d'éviter toute confrontation dans les rues et de veiller à s'écarter de toute forme de violence".
Mais les relations intercommunautaires ont clairement pâti de cette explosion de colère.
Dans la petite ville à majorité catholique de Magherafelt (centre), une église catholique a été endommagée et des tombes d'un cimetière voisin (catholique) violées. Plusieurs pierres tombales ont été recouvertes de slogans sectaires ou même brisées.
Côté protestant, plusieurs halls de réunions de l'ordre d'Orange et d'autres confréries loyalistes ont également subi des dommages.
Le chef de la police nord-irlandaise Hugh Orde a assuré que la violence, "la pire que le Royaume-Uni ait connue ces dernières années", était orchestrée par les groupes armés loyalistes.
Et le ministre britannique chargé de l'Irlande du Nord, Peter Hain, pourrait annoncer mercredi que la Force des volontaires d'Ulster (UVF), le plus ancien des groupes armés protestants a officiellement rompu son cessez-le-feu.
Cette annonce ne surprendra pas les Nord-Irlandais puisque les clandestins de l'UVF, impliqués dans une guerre fratricide, ont abattu une demi-douzaine de loyalistes d'un groupe rival depuis le début de l'été, selon la police.
Elle aura pour conséquence d'exclure automatiquement des négociations de paix le seul élu de la vitrine politique de l'UVF, David Ervine.
Mais les pourparlers pour la mise en oeuvre du partage du pouvoir entre catholiques et protestants, prévu par les accords de paix d'avril 1998, ont été renvoyés aux calendes grecques.
De nombreux dirigeants considèrent donc cette initiative de Londres comme "un coup d'épée dans l'eau", a expliqué le député catholique de Belfast-sud Alasdair McDonnell.
Comment expliquer en profondeur cette explosion de violence loyaliste? les experts comme l'universitaire Peter Shirlow pensent que les élus protestants unionistes "s'écartent de plus en plus du processus de paix" depuis plusieurs années.
"Ils ont présenté systématiquement l'accord d'avril 1998 comme la trahison de leurs droits et de leurs libertés", a précisé ce géographe de l'université d'Ulster.
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