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 Khartoum tempère son opposition à une force de l`Onu au Darfour

Challenges.fr | 18.05.2006 | 15:01

Le président soudanais Omar al Bashir. Les autorités soudanaises semblent avoir tempéré leur hostilité au déploiement d'une force de casques bleus au Darfour, en estimant que la tenue de discussions avec les Nations unies commençait à ouvrir une ''nouvelle fenêtre'' dans les relations entre Khartoum et l'Onu.
(*) - REUTERS - Morteza Nikoubazl
par Opheera McDoom et Daniel Flynn
KHARTOUM (Reuters) - Les autorités soudanaises semblent avoir tempéré leur hostilité au déploiement d'une force de casques bleus au Darfour, en estimant que la tenue de discussions avec les Nations unies commençait à ouvrir une "nouvelle fenêtre" dans les relations entre Khartoum et l'Onu.
La force de l'Union africaine (UA) chargée de surveiller la trêve théoriquement en vigueur au Darfour manque de fonds et de matériel et n'a pas été, de ce fait, en mesure d'empêcher les attaques de milices arabes contre des civils.
Les habitants du Darfour, l'UA elle-même et la communauté internationale ont demandé à l'Onu de succéder à l'Union africaine sur le terrain mais le Soudan s'y était catégoriquement opposé avant la signature d'un accord de paix le 5 mai dernier.
Deux groupes rebelles ont rejeté cet accord, signé par le gouvernement de Khartoum et une faction rebelle plus importante. Les deux groupes non signataires ont jusqu'au 31 mai pour revenir sur leur position.
Le secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, a téléphoné à la présidence soudanaise et va envoyer une délégation de haut rang au Soudan dans les 48 heures pour entamer des consultations sur une mission d'évaluation de l'Onu, a déclaré Madjzoub al Khalifa, conseiller de la présidence soudanaise.
"Il s'agit d'un geste favorable de la part des Nations unies", a déclaré à Reuters Khalifa, chef de l'équipe de négociateurs du gouvernement soudanais. "(...)Ils ont ouvert une nouvelle fenêtre de discussion et de dialogue avec le gouvernement du Soudan", a-t-il ajouté.
Le Conseil de sécurité de l'Onu a adopté mardi une résolution stipulant qu'une délégation de l'Onu, chargée de déterminer les moyens de transférer les responsabilités de l'UA à l'Onu au Darfour en matière de maintien de la paix, devait entamer ses travaux dans un délai d'une semaine, afin que les casques bleus puissent se déployer rapidement.

L'UA a accepté la semaine dernière de transférer ses responsabilités à l'Onu dès que possible, mais le Soudan a alors non seulement rejeté la notion d'une force de casques bleus mais aussi refusé la venue d'une mission d'évaluation de l'Onu.
Jeudi, Khalifa n'a pas dit si Khartoum avait changé d'avis concernant la mission d'évaluation, mais a estimé que la perspective de discussions avec la délégation onusienne constituait "un pas en avant".
ATTAQUES DE DJANDJAOUID DANS L'EST DU TCHAD
On ignore quelle est la situation exacte au Darfour actuellement, les autorités soudanaises restreignant plus que jamais l'accès de la région à la presse étrangère. Aucune autorisation n'a été délivrée à un journaliste depuis la signature de l'accord le 5 mai.
Jan Egeland, secrétaire général adjoint de l'Onu aux Affaires humanitaires, a demandé au gouvernement soudanais de permettre à la presse d'accéder à cette région, notamment parce que les donateurs ne réagissent pas suffisamment vite cette année à la crise humanitaire, ce qui a entraîné, ce mois-ci, une réduction de moitié des rations alimentaires distribuées par la FAO (Organisation pour l'alimentation et l'agriculture).
"Il est capital que les journalistes puissent avoir pleinement accès au Darfour(...) afin de couvrir les travaux humanitaires et expliquer l'urgente nécessité d'un surcroît d'aide internationale", a-t-il dit.
On sait toutefois que des réfugiés ont déclenché des émeutes dans plusieurs camps au Darfour, après la conclusion de l'accord de paix. Bon nombre d'entre eux jugent cet accord incomplet, imposé par l'étranger et les privant de garanties pour leur sécurité.
Le Darfour n'est pas seul à pâtir de la crise humanitaire et politique. Les populations de l'est du Tchad, le pays voisin du Soudan, en font aussi les frais. Face à la poursuite des attaques lancées par les miliciens arabes, les "Djandjaouid", une centaine de Tchadiens en moyenne fuient chaque jour leurs habitations et viennent s'ajouter à un total de 40.000 personnes déplacées, dans la région, qui manquent de vivres et d'eau, a déclaré un responsable de l'Onu.
"Ils affluent au rythme de deux camions de 50 personnes chaque jour", a indiqué à Reuters Steve Adkisson, représentant au Tchad de l'Unicef (Fonds mondial des Nations unies pour l'enfance).
Les Djandjaouid, dont le nom signifie, en arabe, les "diables à cheval" sont tenus responsables d'une vague de viols, de pillages et de meurtres parmi les populations noires du Darfour, où 250.000 personnes ont péri dans les combats et deux millions d'autres personnes ont été chassées de chez elles depuis le déclenchement de la guerre civile en février 2003.


(*) Le président soudanais Omar al Bashir. Les autorités soudanaises semblent avoir tempéré leur hostilité au déploiement d'une force de casques bleus au Darfour, en estimant que la tenue de discussions avec les Nations unies commençait à ouvrir une ''nouvelle fenêtre'' dans les relations entre Khartoum et l'Onu.

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