DIYARBAKIR (Turquie)(AFP) - Un garçon de trois ans a été tué par balle vendredi à Batman (sud-est), portant à sept morts le bilan des émeutes qui frappent depuis le début de la semaine la zone à majorité kurde de la Turquie, a-t-on indiqué de source hospitalière.
Un attentat à la bombe revendiqué par un groupe armé kurde a par ailleurs fait un mort et 13 blessés à Istanbul.
L'enfant suivait sur la terrasse de sa maison les heurts entre jeunes Kurdes et les forces de sécurité lorsqu'il a été atteint à la gorge par une balle, provenant vraisemblablement de l'arme d'un policier qui a tiré en l'air pour disperser quelque 200 manifestants attaquant les forces de l'ordre.
Les émeutes qui secouent Diyarbakir depuis lundi ont ainsi fait tache d'huile à Batman, à quelque 70 km plus à l'est.
Six autres personnes, dont deux enfants, ont été tuées dans les incidents à Diyarbakir.
Le maire kurde de Diyarbakir, Osman Baydemir, a demandé vendredi aux émeutiers lors d'une conférence de presse de "rentrer chez eux" et de mettre fin à leurs actions.
Plus de 250 autres personnes, dont la plupart des membres des forces de sécurité, ont été blessées dans les émeutes qui ont opposé des milliers de jeunes Kurdes, pour la plupart, à la police.
Plus de 280 manifestants ont en outre été arrêtés lors des émeutes, dont quelque 80 vendredi, parmi lesquels une trentaine de mineurs, selon des sources locales.
Les autorités affirment que ces manifestations sont orchestrées par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, séparatiste) qui mène depuis 1984 une lutte armée contre Ankara.
Vendredi, le porte-parole de la police à Ankara, Ismail Caliskan, a évoqué une "provocation" des rebelles kurdes et a accusé les émeutiers de s'être servi des enfants dans les incidents.
Le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan a pour sa part affirmé lors d'une réunion des cadres de son parti à Ankara que "ceux qui jettent leurs enfants dans les rues ou donnent aux organisations terroristes l'occasion de les utiliser pleureront demain en vain".
"Nos forces de sécurité feront ce qu'elles ont à faire, quelles que soient les personnes servant d'instrument au terrorisme, fussent-elles des enfants ou des femmes", a poursuivi M. Erdogan, cité par l'agence de presse Anatolie.
Les manifestants ont vandalisé de nombreux magasins et se sont attaqués aux bâtiments publics dans la ville où des renforts policiers ont été envoyés. Le ministre de l'Intérieur Abdülkadir Aksu est de son côté arrivé à Diyarbakir tard jeudi pour des inspections.
"Les provocateurs seront capturés et jugés", a-t-il dit aux journalistes vendredi, ajoutant que "ces actions visent la démocratie et la stabilité" dans le pays.
Vendredi, la situation semblait relativement calme dans la ville et les magasins avaient rouvert dans l'ensemble, a constaté un journaliste de l'AFP.
Les événements ont commencé lundi lorsque plusieurs milliers de personnes se sont heurtées aux forces de l'ordre après l'enterrement de quatre des 14 rebelles du PKK tués samedi dans des accrochages avec l'armée.
L'agence Anatolie a annoncé vendredi la mort de sept autres rebelles lors de combats avec une unité de gendarmerie dans une zone montagneuse proche de la ville de Silopi, aux confins des frontières irakienne et syrienne.
Deux femmes se trouvaient parmi les rebelles abattus, sur lesquels on a retrouvé 20 kilos d'explosif de type TNT et un nombre important de grenades, a ajouté l'agence, qui n'a pas précisé quand étaient survenus les affrontements.
Le conflit dans le sud-est anatolien a fait au moins 37.000 morts depuis que le PKK, considéré comme une organisation terroriste par la Turquie, l'Union européenne et les Etats-Unis, a pris les armes en 1984 pour obtenir l'indépendance.