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Invitation au débat sur la totalité




Le débat, tel que par parti pris nous l’entendons, a pour enjeu la totalité en devenir. Ce débat est en cours, depuis toute l’histoire, qui est sa progression dans le temps, de même que le monde est son espace, son arène. Il est l’activité contradictoire par laquelle l’humanité se détermine, entre les humains à un moment de l’histoire, dans le passage d’une époque à une autre, et par l’interaction de ces confrontations multiples. Le débat est pratique : il est l’ensemble des actes et des faits grâce auxquels les idées émergent, s’affrontent, circulent, influent à leur tour sur d’autres actes et d’autres faits. Ainsi, le débat parlé, traduction par la réflexion et le langage de ce qui a lieu, qui peut aussi devenir moteur de ce qui a lieu, constitue un moment du débat qui a la totalité pour enjeu, et un de ses moyens indispensables.

L’insatisfaction est l’agent du débat, elle le provoque, elle le motive et l’alimente. Par conséquent, toute communication n’est pas le débat. En actes et par la conscience, sous des formes diverses suivant les époques, les humains insatisfaits révèlent le déphasage entre ce qui est alors admis, ce qui doit être, et ce que cette prétention ne contient pas, ce qui la dépasse et la met en cause. L’insatisfaction est au cœur du débat – dans un monde de satisfaits le débat n’aurait pas lieu d’être.

Mais, de l’ensemble des actes et des discours de l’humanité à leur interprétation par la conscience, le débat se fige. En voulant se saisir du débat, la conscience s’est davantage opposée à sa progression qu’elle ne l’a servie. Si l’humanité est bien l’acteur du débat, jusqu’à maintenant son organisation, sa menée, ses résolutions, n’ont appartenu qu’à une partie d’entre elle, changeante suivant les époques, mais conduisant toujours au même résultat, l’érection et la fixation par la conscience de propositions particulières en dogmes dominants. Sans doute, il ne pouvait qu’en être ainsi par le passé, aux temps où des séparations dans le monde étaient plus puissantes que le savoir de son unicité, aux temps où il restait encore des espaces à découvrir, des communications à établir entre les hommes, des moyens à inventer pour ce faire. Maintenant, la donne a changé. Dans l’époque actuelle, l’humanité dispose des moyens qui permettent la circulation des mêmes visions à l’échelle de la planète, et leur communication à tous ses membres. Reste que le particulier continue de dominer le général. Si ce ne sont plus exactement des messies, des grands hommes, des philosophes, des classes, des bureaucraties, qui dictent leurs directives et sacralisent leurs lois et leurs morales à l’adresse du monde, ce sont bien toujours quelques conceptions particulières qui dominent, érigées en systèmes de croyances indépassables, avec toutes les conséquences et tous les effets concrets qu’ils produisent grâce au travail de leurs valets et qui en renforcent l’apparence d’absolu, par l’adaptation à laquelle chacun est contraint.

Si le débat est en cours, il peut donc paraître suspendu, comme actuellement, du fait de la dictature de pensées particulières sur le devenir de l’humanité. Car jusqu’ici, le débat, dans sa menée, demeure à la fois permanent et discontinu. D’une part parce qu’il entre par moments dans des phases de gel, d’autre part parce que la majorité de ses acteurs potentiels s’en voit en général écartée : elle ne fait que subir quelques propositions certes issues du débat, mais trompeusement présentées comme ses conclusions mêmes. Si le débat n’en reste pas moins le produit permanent de toute l’activité humaine, chacun ne peut considérer son activité particulière comme participant à sa progression. Au contraire, l’éparpillement dans des activités normées et limitées participe au gel du débat.

Par le débat la totalité se meut et se transforme, mais elle lui échappe aussi, parce que sa prise pour objet échappe à ses acteurs potentiels tant que leurs rapports sociaux se fondent sur toute sorte de divisions particulières et figées, et sur l’interposition de médiations qui les gouvernent. Dans l’histoire, les révolutions, depuis la fin du 18ème siècle au moins, sont ces moments où les rapports sociaux existants sont mis en cause, en passe d’être bouleversés. Du débat gelé, du débat entre quelques uns à l’abri des palais et des salons, on passe au débat du plus grand nombre sur toutes les questions posées par ce plus grand nombre. L’organisation du monde ne dépend plus de pouvoirs isolés, la totalité à définir s’offre à la libre volonté de ceux qui la font. Alors, ces phases du débat sont celles où on s’est le plus approché, où on s’est engagé au plus loin vers la maîtrise de sa menée, quand de ses acteurs potentiels les humains se muent en ses acteurs réels. Contre cet élan, les contre-révolutions sont ces moments de la confiscation du débat, où il se referme, où il est encore gelé par quelques consciences policières.

Forte de l’expérience de ces avancées et de ces reculs préalables, nous pensons que désormais l’humanité a ouvert la perspective de la maîtrise du débat. C’est là selon nous la question principale à l’ordre du jour, le nœud du problème. De sa résolution dépend la façon dont le débat peut se poursuivre, c’est-à-dire qu’il soit ou non délibérément mené jusqu’au bout de lui-même. Car la maîtrise du débat n’est pas une fin en soi, contrairement à ce que cultive la conception aujourd’hui dominante sur la communication, communication pour la communication, frénétique, sans but, ignorante de la totalité. Si la pratique maîtrisée du débat importe, c’est parce qu’elle est le moyen pour poser et discuter la question du but. But dont on pourrait donner une formulation prudente et provisoire : résoudre toute l’insatisfaction.




Paralysie



A notre époque, certaines forces prépondérantes empêchent les humains de se saisir du débat sur la totalité. D’après les préoccupations et les impératifs restrictifs qu’elles véhiculent, et grâce à leur rayonnement planétaire, des modes de communication et de pensée prétendent à l’éternité de leur instauration. Mais, du point de vue de la totalité, ils ne sont que des résultats relatifs du débat, auxquels son mouvement et ses horizons ne sont absolument pas réductibles, en dépit de ce qu’on voudrait nous faire croire.

Suivant une progression heurtée, sûre malgré les contradictions qui lui ont été opposées, des moyens particuliers de médiation ont accédé au statut de forces dominantes sur la marche du monde : par elles se trouvent unifiées l’organisation sociale des humains, la définition des raisons et des buts de leurs existences, la gestion de leurs communications. Si elles ne sont pas présentées en ces termes par ceux qui en défendent la supériorité, l’association de trois médiations forces détermine et gouverne aujourd’hui tout rapport humain à l’échelle du monde : ce sont la médiation par l’Etat, la médiation par la marchandise, et la médiation par l’information dominante.

L’Etat est la validation du principe du pouvoir séparé, quand la prise de décision est toujours réservée hiérarchiquement, avec cette autre caractéristique que ses frontières divisent et opposent par la force. La marchandise implique la soumission des humains aux choses, ici celles qui se commercent suivant l’absolu de leur flux perpétuel. L’information dominante consacre l’indépendance d’un intermédiaire autodésigné entre les humains, qui s’arroge le pouvoir de statuer sur le sens du monde. Procédant de leur alliance parfois chaotique, des lois, des règles, des principes sont établis en moyens de diriger et de contrôler l’essentiel des rapports entre les humains. Et l’ampleur de leur influence donne même l’illusion que la communication ainsi contrainte serait toute communication.

Des modes de pensée prédominent, plus spécialement chargés de donner un semblant de contenu à la communication. Leur « logique » commune consiste à certifier l’explication aboutie sur toute chose passée, présente, et à venir, en y soumettant la participation des humains, par là toujours déterminés malgré eux. De ces discours construits mués en systèmes de croyances englobants, qui justifient l’ordre en place contre toute possibilité de le remettre en cause, l’économie demeure encore à la place centrale qu’elle a conquise en deux siècles, où son credo s’est imposé, soit la réduction du débat au simple débat sur la meilleure façon de gérer. Avec l’identification des raisons primordiales de l’organisation sociale à la satisfaction du besoin alimentaire – de seulement nécessaires, la survie et le travail sont promus centraux et essentiels – l’économie prétend satisfaire à la question du sens, tout en concédant la fatalité de la petitesse humaine. Profane, matérialiste et triviale, elle remplit ainsi le même rôle que les religions déistes encore vivaces, qui pour leur part ont au moins le mérite de représenter un au-delà à ce qui est, avec cependant ce défaut fondamental d’en avoir fait un au-delà de l’humanité, fixant par là la totalité hors de portée des humains. Les sciences exactes, par le biais des astrophysiciens, entretiennent la même idée de l’absolu, de l’inaccessible et supérieur à l’humain. 

Dans un registre moins ambitieux, et c’est là une des attributions principales de l’information dominante, la communication est au jour le jour alimentée par la représentation d’événements dont l’impact spectaculaire et émotionnel doit suffire, en se substituant à toute tentative d’analyse et d’explication, déjà empêchée par le surgissement de l’événement suivant. Si des rapports entre les faits, voire une unité, sont parfois mis en évidence, ils ne servent qu’à appuyer ce qui est déjà préétabli, parce que ceux qui en discourent ne débattent pas, ils monologuent. Dans un secteur prévu à cet effet le débat est singé, pour en prévenir la possibilité, et la menace. Enfin, autorisée au plus grand nombre des individus séparés, une tendance plus récente se développe de manière positive dans le monde, qui s’impose comme son idéologie principale. L’activité de communiquer dénuée de sujet et de réalisation devient la plus commune : des progrès pour la marchandise et l’information dominante permis par les techniques numériques aux théories des réseaux qui en découlent, en passant par la consommation hystérique des moyens d’échange virtuels, l’aspiration à communiquer est détournée vers un mode inoffensif, ineffectif. Possible et maîtrise n’y sont entretenus qu’en tant qu’illusions, qui subjuguent d’autant plus qu’elles sont censées se rapporter au monde entier, auquel chacun se trouverait ainsi lié. 


L’asservissement généralisé des humains à l’ensemble des forces qui cultivent le gel actuel du débat tient à une raison commune, procédant d’un rapport à l’aliénation fait d’ignorance et de crainte. Ce rapport constitue la clef de voûte de l’obscurantisme moderne. Dans leur assemblage, moyens de médiation et modes de pensée dominants forment une espèce de bloc de pensée qui fait partie du mouvement de l’ensemble de la pensée. Mais de l’intérieur de ce phénomène en cercle fermé, ce rapport n’apparaît pas. Au contraire, davantage produit d’un consensus inavoué que fruit d’un plan concerté, ce bloc de pensée se perçoit comme le mouvement même de toute la pensée. D’une certaine manière, on pourrait dire qu’il y a là comme une tentative d’expliquer l’aliénation, puisqu’il existe cette prétention de vouloir tout expliquer. Mais il s’agit bien davantage, plus simplement, de l’expression d’une peur, d’une panique, qui pousse à se rassurer comme on peut, dans un élan désespéré. Travestissement d’interprétations partielles et relatives en explications fondamentales, expansion au monde entier d’un mode de gestion sociale basé sur l’isolement du pouvoir, généralisation de la soumission à la marchandise et ambition démente de toujours vouloir en répandre davantage, sont autant de symptômes de la même prétention vouée à l’échec parce que fondée sur la même erreur d’appréciation : des pensées et des volontés particulières voudraient commander au général. Mais comme elles ne demeurent que ces pensées et ces volontés particulières, le général les dépasse, le général leur échappe, perpétuellement l’aliénation plus puissante les malmène.

Du point de vue du débat sur la totalité, et de la perspective de sa maîtrise par les humains organisés pour ce faire, la faiblesse et la lâcheté de ce rapport à l’aliénation sont à dépasser. Là où l’ensemble de la pensée suit son cours indépendamment des consciences, le phénomène par lequel la pensée s’autonomise, s’extrait des consciences pour se transformer au cours de sa circulation, est de nature contradictoire. Il éloigne la possibilité de maîtriser le débat – expansion de sa glaciation par le renforcement des pensées particulières autonomisées – et il y appelle, en lui donnant sa richesse potentielle – l’abusive domination de ces pensées, accentuée par ce phénomène, nourrirait d’autant plus l’insatisfaction à leur égard, moteur de leur renversement possible. La poursuite maîtrisée du débat s’annonce comme une pratique de l’aliénation qui nécessite sa critique, ce qui ne signifie pas sa suppression, mais la prise en considération de son phénomène, la volonté de s’y confronter et de s’en saisir. Contre l’indépendance de l’esprit objectif, la poursuite maîtrisée du débat se présente comme la pratique fondatrice du devenir sujet de l’humanité.    




Activation



Le monde est davantage que l’image pauvre dont le camp de la conservation voudrait se satisfaire. Contre l’organisation et les représentations qu’il en impose, des faits lui échappent qui mettent à mal leur caractère prétendument définitif.

Dans un rapport bien plus direct à l’aliénation, un négatif surgit qui s’en prend à la positivité aveuglée du monde géré suivant les vues des ennemis du débat. Par sa forme encore la plus répandue de l’émeute moderne, la révolte manifeste l’irruption de la nouveauté dans l’histoire. Par leurs actes, collectivement, des humains s’insurgent contre les effets divers de ce qui est et devrait continuer à être sur le même mode. A ce stade, nous croyons que c’est la possibilité de la poursuite du débat qui est mise à jour. A ce stade, du point de vue du débat sur la totalité, nous pensons que son enjeu principal du moment consiste en l’opposition entre ceux qui défendent des pensées qui les dominent, le mouvement de « ce » qu’ils ne font que servir, et les insatisfaits qui libèrent en actes les possibilités de renverser ce rapport par la mise en cause des conditions qu’il détermine. De l’insatisfaction, ce serait là la manifestation plus particulière à notre époque, générée par la gestion de l’absence du débat seulement toléré et encouragé sous forme d’ersatz.

La révolte, en actes collectifs et offensifs, faite de destructions et de rupture, sans caractère partiel préétabli et revendiqué, où la colère féconde prend le pas sur la raison castratrice, la révolte moderne déchire le voile de l’ordre établi : par elle la marche du monde n’apparaît plus aussi évidente que ses idéologues de seconde zone voudraient le croire eux-mêmes. L’activation du débat par la révolte ouvre sur l’inconnu, et c’est bien ce qui annonce passionnante son extension à réaliser. Parce que par leurs actes négatifs les humains l’alimentent en commençant de façonner son contenu, le débat peut se muer en moyen de la connaissance comprise comme activité. C’est alors une charge contre sa conception dominante, basée sur le règne de la raison qui ne sert qu’à dissimuler son incomplétude pour la conscience, suivant laquelle la connaissance ne serait que constat et justification de ce qui arrive. Parce qu’elle est moment collectif du débordement de la conscience par l’émotion, parce qu’elle est rencontre non préméditée d’anonymes qui passent à l’offensive, parce qu’elle dessine dans ce même mouvement un sujet collectif qui met en cause l’objectivité de ce qu’il attaque, l’émeute moderne dans sa généralité s’est révélée comme le mode initial de l’appropriation possible du débat.

A ce stade, le renforcement de cette appropriation fait encore défaut, le plus souvent. Le débat demeure une dispute permanente qui se joue en actes avant tout, en général hors des consciences de ses acteurs. Il leur manque de se saisir de l’unité de leur pratique à l’échelle du monde, ce qui constitue aujourd’hui leur principale carence. L’observation et la réflexion théorique permettent de rendre compte de cette dispute, de se faire une idée de ses moments, de ses avancées et de ses reculs, mais seulement après coup, dans un éloignement que le projet de la maîtrise du débat met aussi en cause.

Cœur du débat, l’opposition actuelle est un conflit à l’échelle du genre. Elle détermine la principale division et la dualité de l’humanité, en deux camps qui s’affrontent mais dont les positions et les effectifs ne sont pas établis une fois pour toutes. D’abord parce que le débat se mène de façon discontinue, ouvert par ceux qui se révoltent aux moments où ils le font. Ensuite parce que les termes du conflit ne sont pas par eux portés en conscience tant qu’ils ne se donnent pas les moyens pour ce faire – sans parler des ennemis du débat qui s’emploient à réprimer toute tentative d’élaborer ces moyens et de rendre publics ces termes du conflit. 

Avec l’expression du négatif inaugural, la question se pose de l’extension du débat, couplée à celle de la menée de la guerre au-delà de l’immédiateté initiale. Dans le camp des révoltés, les perspectives d’organisation dépendent de ces deux exigences, considérant que le contenu du débat n’est pas entièrement déterminé par cette situation conflictuelle. Dans le camp des révoltés, qu’on pourrait appeler le parti de l’histoire, le questionnement central sur le débat, sa prise pour objet, sont une nécessité. Nier cette nécessité est le propre des récupérateurs.

D’après l’exemple des situations de révolte les plus intenses des vingt-cinq dernières années, l’insurrection est apparue comme le prolongement de l’émeute moderne où c’est l’évidence du conflit direct qui paraît être privilégiée. Volonté de s’étendre sur cette base, déterminée par cette urgence, réactive aux manœuvres ennemies, l’insurrection peut faire le choix d’une organisation rudimentaire du point de vue du débat, si on y conserve dans l’organisation de la médiation l'illusion d'une immanence du sens. Le sens, comme toute chose, dépend du débat, et non l’inverse, car dans ce cas, le débat demeure dans les limites du sens fixé en amont, par moins que l’ensemble de ses acteurs potentiels. 

Comme rencontre, la révolte met en jeu la possibilité de confronter collectivement l’insatisfaction d’habitude rentrée en chacun. Entre ses acteurs, le lien qui prévaut désormais est déterminé par leur participation à l’acte négatif, et par leur engagement sur cette base.

D’après ce que nous savons du mouvement des assemblées en Argentine né dans la révolte de l’hiver 2001-2002, ses acteurs se sont organisés sur des bases négatives pour instaurer entre eux le débat en ne s’imposant au commencement aucune limite. Etat, marchandise, information dominante n’ont pas pénétré leur espace de débat. Ils ont confié le pouvoir de définition sur le débat à la base, c'est-à-dire à tous ceux qui souhaitaient s’engager dans les assemblées. Ce faisant, ces révoltés ont créé une nouveauté qui apparaît comme une progression par rapport à l’émeute moderne, et à son extension dans l’insurrection, d’une part sans en nier la qualité propre voire en en reprenant à son compte certains aspects, d’autre part en s’offrant comme possibilité d’explorer l’inconnu ainsi ouvert, et par là de dépasser le négatif « simple ». Sans vouloir le figer en parfait modèle une fois pour toutes, ni présumer de la richesse du contenu des débats qu’il a permis, le mouvement des assemblées en Argentine constitue dans l’époque présente un moment primordial, indication centrale à l’adresse du parti des révoltés.


Le sens des émeutes, du conflit mis à jour par leur unité, du débat qu’elles ouvrent par ce biais, peut être pris pour objet par l’organisation d’un débat parlé de telle sorte que la définition de son contenu ne soit soumise à aucune certitude préalable, sinon celle du conflit, du débat en marche. Dans ce sens, une confrontation collective à l’aliénation est rendue possible, lorsque prime l’examen critique du ici et maintenant, dans l’intention d’une transformation de fond en comble. La nouveauté de ce mode d’organisation bouleverse les conceptions jusque-là connues de l’histoire, notamment sa conception dialectique la plus courante encore chez les partisans de la révolte, qui bien souvent se révèle n’être qu’une justification du réformisme. La dualité de l’humanité n’est pas définie suivant un donné pétrifié, ni d’après des présupposés prétendument réels. Au contraire, elle dépend d’une prise de position sur la discussion et la suppression des présupposés. Ce sont les humains qui donnent ses motifs à leur dispute : l’organisation en assemblées de base souveraines marque l’émergence d’un moyen possible pour définir et vérifier, par la participation de tous, le contenu de la communication. Car dans cette configuration, les humains constitués en sujet franchissent ce pas primordial où ils accèdent au pouvoir de tous sur tout.



Octobre 2006
(extrait du texte Une expérience d'assemblée en France au printemps 2006 - Critique de l'AG en lutte)





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Invitations au Débat sur la Totalité